Marcel Mauss retrouvé. Origines de l’anthropologie du rythme
Paris, Rhuthmos, coll. en ligne, 2010.
Marcel Mauss est l’un de ceux qui ont le plus fait pour la théorie du rythme au XXe siècle... L’objet de cet essai est de remettre en question l’effacement de cet aspect de son œuvre, de restituer cette dimension essentielle à la compréhension de l’œuvre de Marcel Mauss et de montrer en quoi celle-ci peut aujourd’hui nous aider dans la reconstruction épistémologique dont nous avons besoin pour affronter le monde qui vient. (P.M.)
Avant-propos
Marcel Mauss est l’un de ceux qui ont le plus fait pour la théorie du rythme au XXe siècle1 [1]. Pourtant, parmi ses héritiers directs, seul Gurvitch a prolongé, sous une forme du reste très limitée, sa réflexion. Chez Lévi-Strauss, qui place sur le devant de la scène scientifique la notion de structure, le rythme disparaît presque totalement. Il en est de même dans la lecture politique, qui se veut alternative à celle de Lévi-Strauss, donnée par Lefort. Le rythme ne reste une préoccupation que chez des maussiens marginaux comme Bataille ou Caillois, ou encore en paléoanthropologie chez Leroi-Gourhan. Benveniste lui rend hommage dans son essai sur le rythme en Grèce ancienne, mais c’est de manière allusive sans le citer directement. Aujourd’hui, il est largement ignoré du Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales, qui veut continuer la réflexion engagée avec l’essai sur le don sans prêter toutefois aucune attention à cet aspect du travail maussien. Il n’apparaît pas non plus dans les derniers travaux qui lui ont été consacrés par Maurice Godelier et Vincent Descombes [2].
L’objet de cet essai est de combattre cet effacement, en restituant cette dimension essentielle à la compréhension de l’oeuvre de Marcel Mauss et en montrant en quoi celle-ci peut aujourd’hui nous aider dans la reconstruction épistémologique dont nous avons besoin pour affronter le monde qui vient [3].
Pour cela, nous prendrons pour fil directeur la question de la « personne ». Ce thème, central chez Mauss, permet en effet de restituer la manière complexe dont il a posé les bases d’une anthropologie du rythme, qui s’inscrivait par avance en faux contre la lecture structurale et ses héritières, tout en s’émancipant graduellement – non du reste sans quelques hésitations et retours – des conceptions durkheimiennes.
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