La décroissance et l’idée de progrès : entre progressisme et conservatisme critiques
Anne Frémaux se livre ici à une analyse des arguments opposés à la décroissance au titre de la réaction et du conservatisme. Elle revient aussi sur les critiques qui ont été adressées à Jean-Claude Michéa.
Une grande partie des idées développées dans cet article sont issues de l’ouvrage d’Anne Frémaux, La nécessité d’une écologie radicale, Paris, Sang de la Terre, 2011. Une autre source d’inspiration est l’œuvre, pour le moins stimulante, du philosophe Jean-Claude Michéa.
Ainsi que le démontre fort bien Jean-Claude Michéa à longueur d’ouvrages, la religion du progrès est le curseur idéologique le plus reconnaissable d’une gauche (néo)libérale [1] qui considère ‘’l’économie capitaliste comme l’horizon indépassable de notre temps ‘’ (2013b). Cette ‘gauche’, qui a vidé le terme de tout signifiant antilibéral [2], n’en finit pas de célébrer le programme révolutionnaire du capitalisme [3], consistant à soumettre progressivement tous les aspects de la vie humaine au règne du marché et de la technique. Ignorant, voire accompagnant le processus de dévitalisation humaine et sociale engendré par une modernité hautement technicisée, contrôlée et conformiste, elle encourage chaque innovation technologique comme étant l’expression et la source, en réalité questionnables, du progrès humain [4], diabolisant par avance sous l’appellation de « réactionnaire » [5] toute critique formulée à l’encontre de cette idée. Le philosophe orwellien, qui se définit lui-même comme socialiste conservateur, en fait même un sujet d’amusement : « Un militant de gauche est essentiellement reconnaissable, de nos jours, au fait qu’il lui est psychologiquement impossible d’admettre que, dans quelque domaine que ce soit, les choses aient pu aller mieux avant » (Michéa, 2013 : 31). Faisant de la table rase l’un des éléments de son socle idéologique, tel Winston Smith dans 1984, la pensée (néo)libérale tente d’effacer les preuves que le passé ait pu être différent ou meilleur à certains égards, nous dissuadant par là même de juger le présent et l’avenir radieux qui nous est promis à l’aulne de ce qui a été.
Progrès technique et progrès humain
L’idée que le progrès technique n’apporte pas forcément un supplément de sens ou d’âme à la vie humaine, voire même qu’il l’enferme dans une « cage d’acier » pour reprendre l’image attribuée à Max Weber, n’est pourtant pas nouvelle. Marx avait déjà dénoncé l’aliénation du travailleur asservi à sa machine et transformé lui-même en « homme machine » ou encore en être étranger (aliéné) à sa condition d’homme, phénomène parfaitement mis en images par Les Temps modernes de Chaplin. Dans la ligne postmarxiste, les théoriciens de l’école de Francfort et particulièrement Adorno, Horkheimer et Marcuse ont eux aussi développé une critique acerbe de la rationalité instrumentale qui s’est développée avec le projet technicien de domination de la nature. Dans leur fameuse Dialectique de la raison qui aurait été peut-être plus heureusement traduite par ‘La dialectique des Lumières’ (Dialektik der Aufklärung, 1944), Adorno et Horkheimer montrent de quelle manière le procès de réification et de marchandisation de la nature censé assurer la domination de l’homme sur son environnement s’est en réalité retourné contre lui, le transformant lui-même en objet, en produit/ressource (comme en témoigne l’expression ‘ressources humaines’) pour le compte d’autres hommes [6]. Mais plus près de nous, celui qui demeure, malgré sa constante marginalisation par le milieu intellectuel français, le grand penseur « du système de la technique » (marginalisation qui contraste par ailleurs avec le succès que ses écrits rencontrèrent aux États-Unis), est sans aucun doute Jacques Ellul (1912-1994) qui montra dans quelle mesure la logique propre du développement technique nous mène invinciblement vers un système totalitaire.
En effet, l’une des premières contradictions fondamentales propres à la technique et à la science consiste, nous dit-il, dans le fait qu’elles sont le plus souvent vécues sur le mode de la fatalité, comme en témoigne la formule populaire « On n’arrête pas le progrès ! » (Ellul, 1988 : 401). Devenue une force autonome, « aveugle », un processus sans sujet, la technique avance d’elle-même, échappant à tout contrôle démocratique. Cette autonomie du système technicien s’est vue renforcée par l’apparition de l’informatique qui a unifié les sous-systèmes en un ensemble organisé que nul ne maîtrise vraiment, qui s’auto-engendre sans jamais corriger ses erreurs.
Comme le montre Serge Latouche dans un ouvrage récent (2013), Jacques Ellul fut un précurseur majeur de la décroissance critiquant avant elle l’obsession quantitative déshumanisante et irresponsable de nos sociétés de croissance ainsi que la colonisation de nos imaginaires par les objets techniques, autant de processus qui contribuent à créer une atmosphère peu propice à l’aventure spirituelle ou tout simplement à la convivialité, à l’échange humain, à la coopération communautaire, à ce que Gabriel Marcel, un autre penseur chrétien inquiet de l’inhumanité de la technique, résumait sous le terme de ‘’méta-technique’’, c’est-à-dire cette sphère infrangible de sens où les techniques n’auront jamais accès (1951 : 12).
L’idéologie strictement matérialiste du bonheur, propre à la société de consommation, est en effet indissolublement lié au système technicien : celui-ci produit des objets sans utilité humaine réelle qui, à force de propagande médiatique, deviendront quasiment vitaux aux yeux du consommateur. Il ne s’agit pas ici d’évoquer les révolutions technologiques qui ont réellement changé la vie des individus dans un sens émancipateur mais des améliorations techniques ou de la création de gadgets qui remplissent nos vies tout en en vidant le sens. « On produit parce que la technique est là » comme le disait Ellul. Et les citoyens, embarqués dans un système absurde, sont alors amenés à subir une consommation forcée selon la logique de différenciation sociale bien analysée par Baudrillard dans La Société de consommation (1970) ou encore selon la logique du spectacle analysée par Debord (le bonheur ayant avant tout, dans la société de consommation, une dimension « spectaculaire »). L’objet technique est en effet avant tout un langage, un symbole statutaire qui doit inlassablement être remplacé par un autre pour continuer à remplir sa fonction de signe [7] (ce qui signifie l’abolition de sa valeur d’usage au profit de la seule valeur d’échange). Le paradoxe ultime de cette frustration organisée est ce qu’Ivan Illich appelle « la modernisation de la pauvreté ». Le ressort principal de la croissance résidant dans la convoitise d’objets possédés par les privilégiés, il faut produire incessamment de la rareté et des besoins insatisfaits. Au final, ainsi que le souligne l’auteur de La Convivialité « le taux de croissance de la frustration excède largement celui de la production. » (1973 : 86).
Et en effet, au-delà de la peur pour la gauche d’apparaître « réactionnaire », épithète traditionnellement réservé à la droite conservatrice, le logiciel de pensée (néo)libéral qui justifie la course au modernisme n’est autre que la nécessité, dans une économie de marché capitaliste, de créer incessamment de nouveaux produits [8] dont l’obsolescence est d’avance programmée, de nouvelles niches technologiques qui vont permettre l’accroissement du fameux Saint Graal ou ‘taux de croissance’ (‘croissance de la croissance’), indicateur absurde s’il en est qui mesure de façon déraisonnable et irréaliste la santé de nos économies et plus généralement de nos sociétés. Or, comme Bernard Charbonneau (1910-1996), compagnon de route de Jacques Ellul, le disait : ‘on ne peut poursuivre un développement infini dans un monde fini’ [9] : l’idée d’une croissance matérielle exponentielle (heureusement jamais réalisée) dans un monde fini n’est tout simplement pas soutenable écologiquement. À cette limite physique il faut aussi ajouter l’impact éthique, social et politique d’un projet dont le motif central est « la destruction anthropologique des êtres humains transformés en bêtes productrices et consommatrices, en zappeurs abrutis » (Castoriadis, 2005 : 237). Seul l’égarement et l’esprit d’abstraction [10] dont se rend par trop souvent coupable la science économique peut expliquer la promotion d’une telle utopie/dystopie [11].
Faire table rase ?
La condamnation du progrès technique et du progrès en général est le plus souvent le fait d’une tradition conservatrice de droite [12] qui, sous patronage heideggérien, s’inscrit en faux contre l’héritage des lumières qu’elle voudrait bien voir aboli au profit d’un rétropédalage au temps des hiérarchies « naturelles ». D’un autre côté, le refus de la tradition et du passé au nom de l’innovation permanente constitue un motto des progressistes (néo)libéraux de droite comme de gauche qui se considèrent à notre sens à tort, comme les continuateurs du projet émancipateur des Lumières. C’est ce « à tort » qu’il convient ici d’expliciter puisqu’à rebours de l’idéologie du « bougisme » décrite par Taguieff (2001), un conservatisme critique entend défendre le véritable projet émancipateur qui fut au cœur des lumières en offrant de ce mouvement fondateur une lecture critique inspirée de l’esprit dialectique.
Le libéralisme économique, héritier, tout comme le libéralisme politique, de l’Auflklärung, et dont on attribue généralement la paternité à Adam Smith (oubliant souvent au passage la dimension morale de sa philosophie [13]), considère les individus comme des monades indépendantes dont l’interaction n’est motivée que par l’intérêt et dont l’action ne peut être régulée que par la sphère marchande privée (l’égoïsme des uns étant censé faire le bonheur des autres selon la fameuse Fable des Abeilles de Mandeville). Réalisation performative d’une idéologie qui construit les institutions servant à sa propre justification, la défense obsessionnelle du libre marché conduit à la destruction du lien social formé par les solidarités traditionnelles, qui ont pourtant toujours constitué le soubassement fondamental des « sociétés » ou plutôt de ce que Dardot et Laval appellent « le concept de commun » (2014) [14]. En effet, prophétie auto-réalisatrice d’un modèle hobbésien qui définit la « guerre de tous contre tous » comme étant l’anthropologie primaire de toute société [15], la théorie économique prédominante du XIXe siècle commence à organiser la ‘dissociété’ (Généreux, 2006), réprimant le désir de communauté au profit de la libre concurrence imposée à tous. Considérant les individus comme des êtres égoïstes ‘par nature’ uniquement mus par leur seul intérêt (anthropologie négative), elle finit par donner corps à la société ainsi prophétisée : une société de consommateurs et de producteurs individualistes où la liberté se réduit à celle qu’offre le marché économique et dont le maitre mot pourrait fort bien être la formule que Hobbes emprunte à Plaute : ‘Homo Homini Lupus’ - « L’homme est un loup pour l’homme ». Ce qu’il y a de fâcheux dans les théories modernes (du comportement), disait Hannah Arendt, c’est qu’elles peuvent devenir vraies…
En ce sens, le (néo)libéralisme économique [16] et les institutions politiques qui lui sont associées [17] sont parvenues à faire intérioriser à l’être humain l’image de « l’homme nouveau » qui avait été pris comme point de départ de la théorie libérale économique. Or, une société qui considère la compétition entre les individus et la recherche du profit comme le moteur unique du progrès humain, ne peut qu’être touchée, in fine, par des effets « décivilisateurs » dramatiques : montée de la solitude (monadisme), fin des solidarités (égoïsme, amoralité voire cynisme), progrès de l’ignorance (« compétences techniques » en lieu et place du savoir humaniste), course à la réussite (compétition), aliénation (propagande publicitaire), relativisme (« tout se vaut ») et disparition des savoirs normatifs fondamentaux (morale, vertu, civisme). On voit mal comment un tel projet pourrait être associé à l’idéal philosophique des Lumières et à son fameux Sapere Aude (‘’ose savoir’’, ‘’aie le courage de te servir de ton propre entendement’’ [18]), qui signifiait tout d’abord la nécessité de se débarrasser des illusions consolatrices et des préjugés. Cet impératif n’impliquerait rien de moins aujourd’hui que la libération totale à l’égard de l’illusion consumériste et de la religion du progrès qui caractérisent aujourd’hui nos sociétés…illibérales envahies plus que jamais par la nouvelle rationalité politique décrite par Foucault sous le terme de « gouvernementalité », c’est-à-dire par cet ensemble de pratiques institutionnelles visant à influencer les conduites des individus « libres » [19].
En réalité, pour reprendre le titre célèbre d’un ouvrage de Bruno Latour, ‘’nous n’avons jamais été modernes’’ (1991). A peine libérée du poids de la religion et des hiérarchies traditionnelles de l’ordre monarchique, la société « moderne » a versé dans l’utopie capitaliste d’un monde sans limites construit sur de nouvelles hiérarchies bourgeoises [20] dont le critère officiel ne fut pas l’honneur ou la vertu mais simplement l’accumulation monétaire. Bâtie, selon l’expression de Marx, sur des ‘’robinsonnades’’ (sur l’idéal d’êtres humains conçus comme monades rationnelles dépourvues de tout lien social) et sur la foi dans l’avènement d’une société radieuse obtenue grâce au progrès de la rationalité technicienne, elle ne s’est guère libérée des croyances mythiques. Du point de vue politique, les institutions « (néo)libérales » formellement démocratiques semblent servir l’objectif de nous désapprendre la liberté et la participation à la chose publique [21]. C’est sur ce point qu’insiste précisément Cornélius Castoriadis lorsqu’il écrit que toute la vie politique vise précisément à désapprendre aux citoyens l’art de gouverner, l’art de nouer des solidarités et d’exercer leurs responsabilités : « Les institutions actuelles repoussent, éloignent, dissuadent les gens de participer aux affaires » (1998). Un tel projet peut difficilement être associé à l’idéal émancipateur porté par le libéralisme philosophique et politique originel (d’un Locke ou d’un Montesquieu par exemple) qui visait la défense des libertés individuelles et collectives fondamentales [22].
Dès lors, si nous décidions, avec les penseurs dits « progressistes », de faire table rase du passé, cela signifierait aujourd’hui se débarrasser des processus aliénants qui caractérisent l’hypermodernité ou encore sortir hors de l’état de minorité dans lequel l’humanité occidentale se maintient par sa propre faute [23]. En effet, comme le souligne Jean-Louis Prat, « Loin de se fier à un progrès automatique, le penseur des Lumières propose à tous les hommes de lutter pour leur auto-émancipation, tâche toujours actuelle, qui s’exprime dans un projet d’autonomie, ce qui veut dire, aussi, auto-limitation. (…) C’est pourquoi les Lumières restent une bonne source d’inspiration pour ceux qui cherchent, aujourd’hui, à déterminer les limites d’une consommation stimulée par les mass-media, dont le rôle est de faire ressentir des besoins que les consommateurs ignoraient jusqu’alors. » (Prat, 2008)
La pensée des limites
La (réelle) fidélité aux Lumières – qui n’est pas la croyance naïve en un progrès global et linéaire - signifierait en effet la reconquête de notre autonomie face aux forces du marché, face à la propagande publicitaire et au procès de réification dont l’homme fait aujourd’hui l’objet. L’autonomie dont il est question ici (ou la capacité de se donner à soi-même ses propres lois) n’a rien à voir avec la liberté productive et consumériste sans limites promue par l’idéologie libérale actuelle. Il n’y a pas de liberté concrète sans l’acceptation de limites et d’interdits, tels que ceux fournis par le fait écologique ou par le besoin, anthropologique, de vivre ensemble [24]. En ce sens, la société capitaliste est bien la seule civilisation dans l’histoire de l’humanité qui a érigé en élément moteur de son développement le principe de plaisir, c’est-à-dire un ethos infantiliste régressif (Barber, 2007) par lequel nous voulons voir abolies les limites entravant notre toute puissance. Comme le dit Michéa : « il semble ainsi que la Modernité soit la première civilisation (…) à s’être délibérément fondée sur la peur universelle de devenir adulte » (Michéa, 2003 :142).
Cette pensée des limites, est sans aucun doute le point aveugle de la gauche dite « progressiste » et sur ce point, Frédéric Lordon n’a peut-être pas tort de dire, dans un article démesurément à charge contre Michéa (Lordon, 2013) [25], que la problématique des limites représente “l’un des chantiers intellectuels les plus décisifs de la gauche critique, à savoir : comment imaginer des solutions non régressives de régulation des désirs dans une société individualiste ? Comment élaborer d’une manière adéquate au temps présent cette vérité-truisme que l’individu a besoin, pour lui-même et pour la société, de limites ? Faute de s’y atteler, la gauche critique risque fort de se laisser enfermer dans l’indigente alternative « limite » vs. « pas de limite » dont le résultat est couru d’avance : au nom d’un « réalisme anthropologique » (mal compris), la position réactionnaire se fait l’apôtre de « la limite », la gauche se retrouvant, par défaut et par réflexe antinomique, à endosser le « pas de limite ». » C’est d’ailleurs, soi dit en passant, contre ce réflexe même et cet écueil de la pensée binaire que toute l’œuvre de Michéa est dirigée [26] : en tentant de (re)mettre à l’honneur un socialisme critique puisé à la source des mouvements ouvriers et faisant l’apologie de la « décence ordinaire » contre une gauche libérale qui considère l’émancipation des mœurs comme le seul acte révolutionnaire (en réalité très conformiste) dont elle soit capable [27], Michéa montre que le socialisme peut-être tout à la fois anti-totalitaire et anti-libéral, et ne pas être réduit à faire de l’apologie du marché ou de toute nouveauté technique (OGM, gaz de schiste, voitures électriques…) le point d’orgue de sa politique.
La pseudo-restructuration écologique de l’économie parfois mise en avant par les gauches gouvernementales européennes ne rompt en aucun cas avec la logique de l’accumulation capitaliste : en utilisant l’éco-business comme nouvelle source de profit [28], elle continue à servir le paradigme industrialiste prédateur de ressources naturelles. Or, comme l’avait déjà mentionné André Gorz, l’impératif écologique (auquel nous ajouterions l’impératif anthropologique) « exige (…) bien une décroissance de l’économie mais cette décroissance n’exige pas nécessairement des sacrifices ; elle exige seulement des renoncements. » (Gorz, 1991 : 171). Renoncement en effet à un mode de vie prédateur insoutenable et insensé qui se définit par la consommation pour la consommation et qui ne mesure plus le progrès qu’à l’aune de catégories purement quantitatives et abstraites.
Modernité et continuité
La nécessité de refonder la modernité s’impose à nous dès lors que nous souhaitons échapper au processus d’effondrement (social, psychologique, écologique, économique) auquel nous voue la société capitaliste aujourd’hui. Le statut du passé est ici à reconsidérer au regard de l’avenir que nous voulons offrir à nos descendants. Comme le rappelle fort bien Serge Latouche (2006, chap. 3), il est souvent reproché à la décroissance de vouloir revenir à l’âge de pierre ou, dans un registre moins néolithique, à la bougie. Il est par ailleurs intéressant de remarquer que notre mode de vie insensé (du point de vue du gaspillage en énergie, en ressources mais aussi en raison de son vide anthropologique) n’est possible, justement, que parce que des millions de personnes s’éclairent encore à la bougie (ou du moins à la lampe à pétrole). Ainsi, nous dit Serge Latouche citant sur ce point, Silvia Pérez Vitoria, « dans beaucoup de pays du Sud (ou même d’Europe de l’Est), jusqu’à 50% voire 90% des habitants vivent de l’agriculture. Dans leur très grande majorité ces paysans se trouvent exclus du modèle dominant même s’ils en subissent les effets : difficultés à survivre, misère, disparition. » Cette moitié paysanne de l’humanité s’est vu refuser l’accès au ‘’progrès’’ au nom de notre consommation démentielle de ressources. Dès lors, un retour à la bougie ne signifierait pas un grand changement pour elle. Pour nous par contre, pour la petite minorité vivant confortablement au-dessus de ses moyens, cela signifierait peut-être le retour à un mode de vie plus décent, plus frugal, plus partageur où l’agriculture industrielle productiviste serait remplacée par une agriculture paysanne plus soucieuse des sols, de l’eau, de la protection de la biodiversité et des relations sociales. Et finalement, Serge Latouche de conclure, avec Silvia Pérez Vitoria (non sans malice) ‘’somme toute, ce ne serait pas si mal’…En réalité, si le retour à la bougie n’a jamais été le but affiché de la décroissance, celui-ci pourrait bien devenir la conséquence désastreuse d’un effondrement subit de nos sociétés extrêmement dépendantes au pétrole bon marché (dont la fin prochaine est prévue, y compris par les multinationales pétrolières).
Dès lors, la question qui surgit est celle que Jean-Paul Besset avait lui-même posée sous la forme d’un titre d’ouvrage : Comment ne plus être progressiste…sans devenir réactionnaire ? (2005). En d’autres mots, y a-t-il une critique progressiste possible du progrès et plus particulièrement du progrès technique, qui puisse permettre l’avènement d’une société démocratique écologique faisant le lien entre passé, présent et générations futures ?
Aucun retour en arrière n’est jamais possible mais pour donner un ordre d’échelle, il est courant de lire, comme dans l’ouvrage de Serge Latouche, qu’un retour aux niveaux de consommation des années soixante (c’est-à-dire avant la démesure des trente glorieuses) correspondrait à une situation soutenable et équitable écologiquement parlant. Cette pensée de « retour en arrière », ontologiquement impossible à former pour l’entendement progressiste [29], ne signifie pas le retour au mode de vie des « yéyés » mais à un niveau de consommation énergétique à partir duquel il serait possible de concevoir un nouveau modèle de société. Il s’agirait donc bien d’un cadre de pensée sous contraintes (matérielles mais aussi anthropologiques), loin de l’utopie capitaliste pour le moins séduisante mais mortifère d’un prométhéisme absolu.
A contrario de l’optimisme technicien [30] qui conçoit la technique comme capable de résoudre les problèmes qu’elle crée (le fameux ‘’on finira bien par trouver une solution’’ ou le mythe du découplage entre croissance économique et croissance matérielle qui n’en finit pas d’être contredit par les faits [31]), la décroissance place son projet d’avenir sous l’égide d’une décolonisation de l’imaginaire capitaliste et technicien [32] ou, en d’autres termes, sous l’égide d’un changement anthropologique dans l’ordre des valeurs qui, dans le langage d’Ellul, signifie la recherche systématique et volontaire de la « non-puissance ». En effet, ‘’le problème fondamental que pose la technique, c’est en définitive celui de sa puissance. Non seulement c’est elle – par les moyens démesurés qu’elle offre à l’homme - qui épuise les ressources naturelles, multiplie les risques et rend les guerres infiniment meurtrières, mais c’est elle [aussi] qui détruit les valeurs’’ (Porquet, 2012 : 310 sq.).
La résistance passe donc, non seulement par la recherche du commun (Dardot & Laval, 2014) mais aussi par le ralentissement (slow food, slow movement, slow cities) le changement d’échelle (‘’less is more’’, ‘’Small is beautiful’’), la frugalité et la simplicité volontaire que nous saurons imposer à nos existences. Ce changement dans l’ordre des idées comme dans la façon de vivre implique une résistance individuelle à l’attrait exercé par les nouveautés technologiques, par la propagande publicitaire, ainsi qu’un refus des pratiques prédatrices de temps et de relations sociales qui sont le lot de nos sociétés obsédées par la vitesse [33]. Il s’agit donc d’une révolution culturelle à imposer, demandant à chacun l’effort quotidien de rompre, à son niveau, avec l’imaginaire capitaliste et marchand [34]. Du point de vue collectif, cela signifie la lutte citoyenne contre les projets délirants et socialement inutiles, les combats sociaux et politiques contre la marchandisation de nos existences et contre l’exaltation de la concurrence vécue comme unique modus vivendi ainsi que le combat pour la revivification de la démocratie (empowerment).
La conservation comme acte révolutionnaire
Il n’a guère été question, dans ce propos, de la question, pourtant essentielle du « bonheur » à l’aulne de laquelle devrait être jugée toute politique dite « progressiste ». Or, sur ce point, les études [35] confirment le paradoxe mis en avant par Easterlin en 1974 et concordent pour défendre l’idée qu’au delà d’un certain seuil, plus le niveau de vie matériel progresse, plus la quantité de personnes prêtes à se déclarer « heureuses » diminue. Les citoyens des sociétés de marché avancées sont en effet hantés par la morosité voire par de véritables signes cliniques de dépression, essentiellement dus à la perte du lien social et à la dégradation du milieu environnemental. C’est ce qui justifie en partie la formule tant moquée du « c’était mieux avant » reléguée par les hérauts des temps modernes au rang de trouble psychologique (« biais cognitif du statu quo » ou « peur pathologique du changement »).
En réalité, le modernisme fait fausse route dès lors qu’il entend faire disparaître toute référence au passé comme signe d’un conservatisme et d’un immobilisme par avance congédiés comme « anti-modernes ». Il n’y aura pas de projet progressiste (tourné vers l’avenir) sans conservation : conservation des processus écologiques face aux politiques de destruction et d’appropriation privée, conservation des biens en lieu et place de leur destruction systématique par le système institué du gaspillage, conservation d’une conception humaniste de la culture et de l’éducation face aux attaques du néolibéralisme, conservation d’activités solidaires et de liens sociaux face au travail de décomposition capitaliste des rapports humains. Conservatisme également du « principe de prudence » fustigé par ceux qui font l’apologie de risques qu’ils ne prennent pas pour eux-mêmes et conservatisme, enfin, du principe de vigilance civique face à la perte de nos libertés au nom de l’idéal sécuritaire, symptôme délétère d’une vie sociale et démocratique en décomposition (Agamben, 2014).
L’esprit de « tradition » dont il est question ici ne signifie pas le retour à un mode de vie hiérarchisé selon des catégories naturelles fort peu défendables. Il s’agit plutôt d’une réhabilitation de pratiques qui faisaient, dans le passé, simplement honneur au bon sens avant la colonisation de nos actions par l’esprit d’abstraction, la bureaucratie, le productivisme et l’esprit de compétition. Ainsi Castoriadis raconte-t-il le souci de l’avenir qui accompagnait naturellement la manière d’agir de ses ancêtres : “Dans le pays d’où je viens, la génération de mes grands-pères n’avait jamais entendu parler de planification à long terme, d’externalités, de dérive des continents ou d’expansion de l’univers. Mais, encore pendant leur vieillesse, ils continuaient à planter des oliviers et des cyprès, sans se poser de questions sur les coûts et les rendements. Ils savaient qu’ils auraient à mourir, et qu’il fallait laisser la terre en bon état pour ceux qui viendraient après eux, peut-être rien que pour la terre elle-même. Ils savaient que, quelle que fût la puissance dont ils pouvaient disposer, elle ne pouvait avoir de résultats bénéfiques que s’ils obéissaient aux saisons, faisaient attention aux vents, et respectaient l’imprévisible Méditerranée, s’ils taillaient les arbres au moment voulu et laissaient au moût de l’année le temps qu’il lui fallait pour le faire. Ils ne pensaient pas en termes d’infini - peut-être n’auraient-ils pas compris le sens du mot ; mais ils agissaient, vivaient et mouraient dans un temps véritablement sans fin » (Prat, 2008).
Le souci de l’avenir aujourd’hui sacrifié sur l’autel de la jouissance de l’instant, nous place devant la nécessité de nous tourner vers le passé pour retrouver des modes d’agir plus prudents ou simplement plus éthiques (selon « l’éthique du futur » théorisée par Hans Jonas), en rupture totale avec « l’esprit de rupture permanente » et de « destruction créatrice » qui animent notre temps. C’est pourquoi nous pouvons soutenir, avec Michéa, que le conservatisme est la seule position radicale cohérente de notre époque ou encore que la conservation est un acte aujourd’hui résolument révolutionnaire. Encore faut-il définir par là un conservatisme critique de gauche qui conserve de la modernité son projet émancipateur (l’émancipation de l’individu) et du passé, les vertus traditionnelles telles qu’elles furent célébrées sous le nom de common decency par Orwell (honnêteté, loyauté, esprit d’entraide, bienveillance, souci de l’autre etc.) c’est-à-dire cet esprit du don dont Mauss faisait le sol fondateur des relations humaines et qui constitue aujourd’hui, dans « une société de plus en plus amorale, inégalitaire et aliénante » (Michéa, 2013 : 9), un véritable acte de résistance humaniste. Dès lors, « il ne s’agit pas de revenir à une « tradition » hypostasiée, pétrifiée ; mais de se réapproprier les formes de vie « moins réifiées » du passé pour résister à la « cage de fer » de la société industrielle, et, dans le meilleur des cas, pour inventer de nouveaux types de socialité qui offriraient aux hommes « la possibilité de mener à bien […] leur auto-accomplissement » » (Barillon, 2004 : 16). Cela signifie aujourd’hui la nécessité de résister aux effets écologiques, économiques, sociaux, culturels, psychologiques et moraux dévastateurs de la logique (néo)libérale. Dans ce processus, le capitalisme représente plus que jamais une étape à dépasser, une utopie nocive à combattre activement dans la mesure où son universalisation n’implique rien de moins qu’une contradiction matérielle indépassable, un risque de barbarie et de destruction de l’humanité même de l’homme.
Pourquoi la décroissance ?
André Gorz nous invitait, tout comme Michéa, à ne pas abandonner le terme « socialisme » dans cette lutte anti-capitaliste : « [le socialisme] se définit comme opposition au capitalisme, c’est-à-dire comme critique radicale de formes de société dans lesquelles le rapport des forces sociales, les processus de décision, la technique, le travail, la civilisation quotidienne, les modèles de consommation et de développement portent l’empreinte d’un souci de rentabilité aussi grande que possible. L’abandon de la référence au socialisme conduirait à abandonner aussi toute référence à un désirable au-delà du capitalisme, à accepter celui-ci comme « naturel » et indépassable » (Gorz, 1991 :13-14). Cependant, face à la captation du terme de « socialisme » par la gauche néolibérale (Parti socialiste en France, SPD en Allemagne, Parti travailliste au Royaume-Uni, etc.), il est urgent de mettre en avant une nouvelle référence pour désigner les forces réellement critiques du paradigme existant [36].
En quoi la décroissance est-elle la mieux placée pour défendre cette conception critique ? Tout d’abord parce que sa dénomination volontairement ‘repoussoir’ (un « mot obus » selon Paul Ariès) empêche qu’elle soit recyclée, comme toutes les entreprises critiques précédentes (socialisme, écologie, développement durable, etc.), par le système capitaliste lui-même qui possède une capacité d’absorption hors du commun de ses ennemis idéologiques [37]. L’évocation du terme « décroissance » interdit par avance toute collusion avec l’adversaire contre lequel elle s’active.
Ensuite, parce que son terrain de résistance se situe non seulement sur celui de l’économie et du politique mais aussi sur le plan culturel stratégiquement crucial des valeurs et des modes de vie : il s’agit de développer une manière de voir, de penser et d’agir qui invite à rompre méthodiquement avec l’imaginaire utilitariste capitaliste, c’est-à-dire avec le capitalisme en général considéré comme « fait social total » (Michéa, 2008 : 94-95). Ce terrain social, culturel et psychologique de la lutte constitue un véritable nerf de la guerre contre un système susceptible de recycler à son avantage tous ses échecs économiques et d’en sortir même revigoré (comme le montre le renforcement des politiques économiques néolibérales après la crise de 2008). C’est en effet sur le terrain des processus de subjectivation propres à la gouvernementalité, que la décroissance joue son va-tout. Sans une nécessaire décolonisation de notre imaginaire et une déséconomisation des esprits pour changer vraiment le monde, nous courons le risque que « le changement du monde nous y condamne dans la douleur » (Latouche, 2004 : 115). Et Serge Latouche de filer la comparaison avec le monde Romain de la fin de la République : « nous ne pouvons plus supporter ni nos vices ni leurs remèdes » (116). Il nous faut dès lors changer notre vision du monde, imaginer d’autres significations pour notre existence, envisager des solutions vraiment originales aux crises multiples que nous rencontrons, afin d’éviter que le monde ne nous y contraigne matériellement de manière brutale. En ce sens « les idéalistes ne sont pas ceux que l’on croit » (Frémaux, chap. 1) : l’idéologie de la croissance est un idéalisme qui s’ignore dans la mesure où elle se fonde sur une conception erronée de la réalité (le monde conçu comme infini) alors que la décroissance constitue le seul projet « réaliste » intégrant la nécessité matérielle d’un monde fini.
Conclusion : la crise de l’homme ?
Comme le dit Slavoj Žižek « il est plus facile d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme » (Aeschimann, 2008). Et en effet, rien ne permet de penser aujourd’hui que l’avenir de l’humanité ne sera pas ce que Michéa décrit sous la parabole « Blade runner » : un monde désolé où des individus fantomatiques se côtoieront sans rien représenter les uns pour les autres sur fond de propagande publicitaire outrancière. A la différence des générations précédentes qui, lorsqu’elles furent placées par leurs aînés face à un monde injuste et insensé, étaient animées par l’esprit de révolte, notre génération ne se vit pas sur le mode de la négation mais sur celui de l’affirmation, de l’acquiescement naïf et béat face à la logique sournoise de l’absurde qui caractérise le capitalisme mondialisé. Certes, chacun brûle de vivre dans la tranquillité tentant de fermer les yeux sur les processus d’exploitation, de destruction [38] et d’avilissement qui sont en cours. C’est là un phénomène bien normal.
Cependant, à la question originellement posée par Camus, « y a-t-il une crise de l’homme ? » (1946), nous pourrions répondre aujourd’hui encore par l’affirmative : le renversement cynique des valeurs opéré par nos sociétés, le renforcement de l’insécurité existentielle généralisée et induit par un système de plus en plus indifférent à l’humain, ne suscite que trop peu d’indignation et de débats dans toutes les diverses couches de la société, la révolte décroissante semblant encore demeurer le lot d’une minorité « éclairée ». Comme au temps de la barbarie nazie décrite par Camus, nous courons le risque de n’avoir bientôt à notre disposition, pour lutter contre l’effondrement qui vient, que la faible conscience de l’absurdité où nous vivons. En effet, « si l’on ne croit à rien, si rien n’a de sens et si nous ne pouvons affirmer aucune valeur, alors tout est permis et rien n’a d’importance. Alors, il n’y a ni bien ni mal (…) Et puisque nous pens[o]ns que rien n’a de sens, Il [faut] conclure que celui qui a raison, c’est celui qui réussit, et qu’il a raison pendant le temps qu’il réussit”. Chat noir, chat blanc… Peu importe, disait Deng Xiaoping : le bon chat est le chat qui attrape la souris…
Cette preuve par la réussite ou par la puissance caractérise parfaitement le capitalisme moderne comme tout régime totalitaire en général : « ce système est vrai puisqu’il réussit ». Ce critère épistémologique on ne peut plus pragmatique et le nihilisme qui l’accompagne, caractérisent parfaitement la realpolitik aujourd’hui et ne rencontrent aucun obstacle sur leur passage en raison de l’effondrement normatif voulu par l’hyper(ou post) modernité.
Cependant, comme le disait aussi Camus, si « celui qui espère en la condition humaine est un fou (…) celui qui désespère des événements est un lâche »… Il faut donc lutter et pour ce faire, compter particulièrement ici sur la part d’humanité et de lucidité qui demeure encore en chacun de nous, c’est-à-dire sur cette part de « sens » dont la société industrielle ne nous pas encore dépossédé…Dans cette entreprise, l’exercice (le devoir) de mémoire apparaît comme une œuvre primordiale afin de recréer les conditions possible d’une énonciation normative permettant de « concilier une pensée pessimiste et une action optimiste » (le fameux « pessimisme de la raison et optimisme de la volonté » de Gramsci) dont toute révolte contre des faits injustes a besoin. La rupture avec le passé a toujours été l’une des caractéristiques du phénomène totalitaire dont la logique refuse de façon agressive que l’« avenir radieux promis » (et jamais advenu) soit remis en question par l’idée simple que « les choses, à certains points de vue, étaient mieux avant ». A ce titre, la logique libérale et le projet modernisateur « à toux prix » qui la caractérise (et dont notre « gauche » est aujourd’hui exemplaire), risque de faire triste figure au panthéon des œuvres libératrices. A contrario du brouillage des repères et des entreprises de confusion sciemment opérées par nos « ministères de la vérité », citons pour finir ce proverbe africain qui nous offre une image de sagesse ou de bon sens traditionnel dans la brume dissolvante de l’antimodernité : « quand tu ne sais plus où tu vas, retourne-toi et regarde d’où tu viens. ».
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