Revue du Mauss permanente (https://journaldumauss.net)

Alain Caillé et Anne-Marie Fixot

Sortir du « tout carcéral »

Texte publié le 1er octobre 2012

Les mesures annoncées par la garde des sceaux Mme Christiane Taubira qui visent à désengorger les prisons en sortant du tout-carcéral (qui induit toujours plus de récidives) déchaînent les passions et font l’objet d’un virulent tir de barrage à droite. Le tout prochain numéro de La Revue du MAUSS semestrielle, le n° 40, qui sera en librairie fin octobre, porte précisément sur ce thème. Intitulé « Sortir de (la) prison. Entre don, abandon et pardon », réunissant les textes de certains des meilleurs connaisseurs de la question, il permet de se faire une idée précise de l’importance de ce débat et de la pertinence des mesures proposées. Compte tenu de cette actualité, nous avons décidé de mettre tout de suite en ligne la présentation détaillée de ce numéro (ainsi que son sommaire), qui peut être commandé dès maintenant en cliquant sur le lien ci-dessous, afin de l’obtenir dès la sortie de l’imprimeur, à partir de la mi-octobre. A.C.
Sortie en librairie fin octobre 2012. Editions La Découverte (22 euros).
Pré-commander via Paypal (au prix de 25,80 euros, frais de port inclus) : http://www.payloadz.com/go/sip?id=1864184

Les prisons françaises sont dans un état moral et physique dramatique [1]. Et plus encore, peut-être, les plus neuves et les plus récentes, plus inhumaines encore que les plus anciennes. Loin de permettre aux délinquants de réparer leur délit en s’en distanciant et en se réparant eux-mêmes, pour accéder, à la sortie, à une vie normale, elles renforcent la haine, l’inadaptation et les motivations à une délinquance accrue. La sortie de prison se révèle du coup particulièrement problématique. Comment l’aménager pour qu’elle ne conduise pas à l’effondrement et/ou à la récidive ? Qu’elle ne soit pas un accélérateur de la délinquance ? C’est la question que se posait un important colloque organisé à Caen en février 2012 [2]. On en reprend ici certaines des contributions. Mais au-delà même de la question des modalités souhaitables de la sortie de prison, il convient de se demander comment il serait possible de sortir du régime actuel de la prison en tant qu’institution et de son monopole du châtiment légitime, si contre-productif et délétère. De sortir de la prison, envisagée comme unique sanction et unique remède à la délinquance et au crime. C’est en mettant à profit l’éclairage du paradigme du don que l’on explore les possibilités d’une voie moyenne, qui ne laisse pas les populations carcérales à l’abandon et leur ouvre la possibilité d’accéder à un pardon qui ne soit pas absolution mais don d’un possible renouveau.

En ouverture

Pour prendre une première mesure des problèmes que pose l’institution de la prison, nous avons placé en ouverture trois textes, totalement différents, qui, chacun à sa manière, en explorent certaines des coordonnées. Le premier, qui est au plus près des problèmes concrets et immédiat soulevés par la prison, est composé à partir d’une brochure réalisée par le Groupe national de concertation prison (GNCP) en vue d’animer des débats nationaux qui se dérouleront prochainement, en novembre 2012. Ce groupe réunit toutes les associations qui se préoccupent du sort des prisonniers durant leur incarcération ou après leur sortie [3]. À part les détenus eux-mêmes, personne n’est mieux placé pour voir et juger de la réalité carcérale. Le diagnostic, notamment sous la plume d’Alain Cugno, animateur d’une de ces associations, est sans appel : « Le nombre de personnes emprisonnées est en train d’atteindre des records historiques. Or jamais, nulle part, l’augmentation du nombre de personnes incarcérées n’a fait diminuer la criminalité ni la délinquance. Il y aurait même de sérieuses raisons pour penser l’inverse. La construction de nouvelles prisons peut se donner l’objectif, certes louable, de mettre fin à la surpopulation carcérale, source de situations intolérables aussi bien pour les personnes détenues que pour les surveillants et l’ensemble du personnel pénitentiaire, elle ne fait en réalité qu’entériner cette fausse évidence que la prison est un moyen de lutte efficace pour assurer la sécurité et la sérénité d’une nation. » Une part considérable du budget de la justice est affectée à la construction de prisons neuves, « fonctionnelles », c’est à dire, en réalité, effroyablement déshumanisantes et désocialisantes [4] – en ouvrant du même coup un large marché à l’investissement privé –, alors que, de l’avis de tous les observateurs ou analystes, l’urgence n’est pas tant à l’augmentation du nombre de places qu’à la diminution du nombre d’incarcérations, d’une part, et, de l’autre, au changement radical de logique de l’institution de la prison. Sans doute doit-elle faire expier, mais il lui faut aussi préparer de facto, et pas seulement de manière rhétorique, la réinsertion à la sortie. Or pour cela, au lieu de diviser, séparer, fragmenter, parcelliser la vie en prison, il faut qu’elle soit l’occasion d’une possible (re)socialisation et de la (re)conquête d’un sens de la vie qui a fait défaut, et qui permette aux détenus de faire le lien entre l’avant, le pendant et l’après de leur emprisonnement. Cependant, pour faire ne serait-ce que quelques pas dans cette direction, il faut d’abord cesser d’imaginer que la prison est la seule peine possible et le seul remède concevable à la criminalité. D’où l’importance du tableau dressé par le document du GNCP, qui liste l’ensemble des alternatives. Dont il reste, évidemment, à évaluer les taux d’efficacité respectifs [5].
D’une certaine manière, ce qui vient d’être dit là, tout le monde le sait ou le pressent. Personne n’ignore en tout cas vraiment que nos prisons sont à l’abandon, ainsi que ceux qui les peuplent. Abandonnés, c’est-à-dire mis au ban et, d’une certaine manière, pour nombre d’entre eux, pour toujours. Si le problème des prisons, et le scandale qu’elles représentent, ont tant de mal à émerger dans le débat public, si tout le monde ou presque préfère en somme que la question ne soit pas posée, c’est à la fois parce que personne ne croit que la prison puisse parvenir à (re)socialiser là où la famille et l’école ont échoué, et peut-être aussi en raison de la prégnance d’une conception dominante du pardon qui empêche de bien poser la question. Car la question du pardon se pose nécessairement. D’un détenu qui a purgé sa peine, peut-on dire qu’il s’est acquitté de sa dette envers la victime ou la société ? Peut-être, si on en reste à une conception comptable et utilitariste du crime et de la justice [6] : le crime a coûté tant, et il est réparé au bout de tant de semaines, de mois ou d’années d’emprisonnement. Il se paierait, à un prix déterminé, comme on paie une marchandise. Mais, évidemment, personne ne raisonne réellement ainsi. Personne, pas plus les victimes ou les personnes ordinaires que le délinquant lui-même ne peut imaginer qu’il puisse en être jamais quitte à ce compte-là. Comme dans les logiques de don et de contre-don, la faute comme la dette [7] ne s’abolit jamais, mais circule et se transforme. Pour que celui qui sort de prison puisse en effet repartir d’un pas nouveau et allégé, il faut quelque chose en plus de l’accomplissement de la peine, il faut une forme de pardon.
Qu’est-ce à dire ? Sur ce point, l’article de Julien Rémy [8] est particulièrement éclairant. Il rappelle les conceptions du pardon développées par les philosophes Vladimir Jankélévitch et Jaques Derrida. Conceptions qui s’inscrivent dans le fil de certaines traditions juives et chrétiennes radicales et qui informent encore nos représentations spontanées et courantes du pardon. Conceptions très exigeantes. Trop exigeantes. Pour que puisse exister un vrai pardon, le pardon pur, il faudrait, à les en croire, que le criminel ou le coupable ne se repente pas, sans quoi le pardon pourrait être soupçonné d’acheter le repentir et de rester entaché par une part de calcul. Or à en rester à cette conception intransigeante [9] du pardon, sa possibilité même s’évanouit. Le don est la figure de l’impossible, écrivait Derrida. On devrait alors dire que le pardon est l’impossible au carré. Sans compter que Jankélévitch concluait qu’après la Shoah il y a des crimes impardonnables. Si l’on en revient à l’opinion courante, et pour autant qu’elle participe majoritairement d’une conception comparable du pardon, on comprend mieux pourquoi elle n’est pas prête à pardonner quelque délit que ce soit. Si pardonner, c’est pardonner hors de toute repentance et de tout engagement de s’amender, alors il est normal qu’elle préfère vouer à l’abandon les auteurs des délits. Mais les choses changent du tout au tout si on entend le don et le pardon, dans le sillage de Mauss, non pas comme un don ou un pardon héroïques, réservés aux seuls virtuoses de la sainteté et de l’inaccessible, mais comme un don ou un pardon « modestes ». Entre le calcul utilitariste fonctionnel, qui broie toute humanité, et le don ou le pardon « purs », figures de l’impossible, il y a place pour un don à hauteur des êtres humains concrets, qui n’est rien d’autre que le don du possible, subordonné non pas à l’absence de la repentance mais à un pari sur l’avenir. Sur l’avenir, sur la puissance de la démocratie et de l’humanité des hommes (et des femmes) [10].
Le troisième texte explore de manière hautement troublante une tout autre dimension de la prison, encore. On sait que, dans son célèbre Surveiller et punir [11], Michel Foucault trouvait dans le panoptique le modèle de prison idéal, inventé par Jeremy Bentham, père de la doctrine utilitariste, l’essence de la prison et, dans celle-ci, la forme par excellence de la surveillance et de la punition modernes, par opposition aux châtiments d’Ancien Régime. Le principe en est que le surveillant, situé au centre d’un anneau, dans une tour qui ouvre sur toutes les cellules, peut voir, à tout moment, les prisonniers, sans en être vu en retour [12]. Christian Laval, qui est un des meilleurs connaisseurs de l’œuvre de Bentham, rappelle ici [13] l’histoire de l’invention du panoptique par Bentham et la lecture qu’en a donnée Michel Foucault. Les lecteurs des textes de Christian Laval et de son ami Pierre Dardot [14] savent comment, au croisement de Foucault et Marx, ils voient dans le néolibéralisme une machinerie, un « dispositif » grâce auquel c’est par la liberté même accordée aux sujets économiques marchands que la société s’assure la meilleure prise sur eux, la surveillance et le contrôle les plus efficaces. Et les plus économiques, les moins onéreux. D’une certaine manière, le marché joue pour les sujets normaux le même rôle que le panoptique pour les prisonniers. Précisons ce point. Une des idées centrales de Bentham, disciple d’Adam Smith en économie politique, était que sur le marché il se produit une « harmonisation naturelle » des intérêts – pour le dire dans le langage de Élie Halévy, le grand historien de l’utilitarisme – mais que cela n’est pas vrai en dehors du marché. Chacun poursuit bien la recherche de son utilité propre, self-regarding, comme sur le marché, mais, à la différence de la main invisible de Smith, il n’en résulte pas « naturellement » la maximisation du « plus grand bonheur du plus grand nombre », principe de base de la justice utilitariste. Pour concilier la justice – i.e. « le plus grand bonheur du plus grand nombre » – et la satisfaction des intérêts individuels, il faut qu’un législateur bienveillant joue sur la formation des désirs pour les rendre compatibles à la fois entre eux et avec le plus grand bonheur du plus grand nombre. L’instrument de ce modelage des désirs individuels est l’ensemble des châtiments et des peines instaurés par le législateur bienveillant. La prison devient l’outil par excellence de la dernière chance de remodelage des désirs inadaptés, et le directeur de la prison panoptique est le bras séculier du législateur bienveillant.
Jusqu’à ce point, on pourrait suivre Foucault, sans plus, et voir dans le panoptisme et dans son asymétrie constitutive entre celui qui voit et ceux qui sont vus une entorse majeure au respect des hommes et à la démocratie, même si Foucault, on le sait, ne se réclamait pas de l’humanisme et ne se souciait guère de la démocratie. Mais Christian Laval, dans ce texte qui fera probablement date, complique et enrichit singulièrement le propos foucaldien originel, jusqu’à le rendre en partie indécidable. Retraçant l’évolution des idées de Bentham sur le panoptique, il montre en effet de manière saisissante comment, au fur et à mesure que celui-ci se convertissait à l’idéal démocratique, il introduisait une réversibilité radicale au cœur même de son principe panoptique. Au terme de cette évolution, ce ne sont plus seulement les détenus qui, pour lui, doivent faire l’objet d’une surveillance permanente, ce sont les gouvernants eux-mêmes qui doivent être placés constamment sous le regard vigilant des citoyens, à qui rien de leurs faits et gestes, voire de leurs pensées ne doit échapper. La démocratie – au moins la démocratie utilitariste – est ainsi identifiée à une sorte de panoptisme généralisé, dans lequel tout le monde voit, mais aussi surveille tout le monde, sous le regard de tous. Christian Laval détaille de façon saisissante et très informée la montée en puissance actuelle de ce panoptisme généralisé. De la multiplication des caméras de surveillance au diagnostic précoce des facteurs de risque social ou médical jusqu’à la multiplication des fichiers en tout genre, il devient un panoptisme non seulement de l’instant, mais tout autant du passé et de l’avenir. Dès lors, c’est la société elle-même, la société normale des gens normaux, qui, soumise à un objectif de transparence absolue et universelle, apparaît comme le prolongement et la généralisation de la prison. Une fois généralisé, le principe de la prison panoptique devient le principe général de l’existence commune ordinaire. Et, réciproquement, la peur de la prison est ce qui fait adhérer au panoptisme universel en instaurant un clivage tranchant entre le bon et le mauvais panoptisme, entre bons et mauvais citoyens. Entre ceux qui méritent la normalité et ceux qui méritent l’abandon [15].
On pourra, bien sûr, discuter ces analyses suggestives, mais non sans en signaler ce qu’elles comportent de plus troublant : cette société panoptique de surveillance générale et de transparence absolue, désormais identifiée à l’idéal démocratique, n’en sommes-nous pas, au moins pour une partie de nous-mêmes, demandeurs ? Si, comme le pensait Bentham, elle devait permettre en effet la disparition des délits et favoriser l’adéquation des désirs de chacun au plus grand bonheur de tous, dans l’harmonie de la transparence universelle, ne l’appellerions-nous pas de nos vœux ? Il y a là, sans doute, une autre des raisons pour lesquelles il est si difficile de faire naître un véritable débat sur le statut de la prison. Les détenus font l’objet d’une surveillance toujours plus grande et intime ? Oui, sans doute, mais n’est-ce pas là, de plus en plus, pense l’opinion dominante, le lot d’à peu près tout le monde aujourd’hui ?

L’horreur carcérale

Toutes ces raisons, si elles l’expliquent en partie, ne justifient pourtant en rien que nous détournions le regard de la réalité de la prison, pour refuser de voir en face ce qu’il est difficile de ne pas caractériser comme l’horreur carcérale. C’est celle-ci qui ressort de façon frappante des textes réunis dans cette première partie. À commencer par celui, particulièrement synthétique et informé, de Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui décrit de façon très sobre mais d’autant plus parlante peut-être, le choc de la première découverte de l’incarcération, puis l’épreuve du quotidien carcéral, pour montrer comment le sort qui est fait aux détenus peut être analysé comme une réplique aggravée de celui qui est réservé aux déshérités de notre société. À partir du constat statistique de leur surreprésentation en prison, « il faut se demander, conclut-il, comment la puissance publique, qui en a la charge à titre exclusif (ou par le cahier des charges interposé d’un concessionnaire) a imaginé, conçu et déterminé les modalités de l’hébergement des détenus. La réponse est que, si l’on met à part les contraintes particulières liées à la sécurité, extrêmement visibles, elle a choisi d’assurer leur existence comme elle intervient par ailleurs auprès des catégories populaires. “C’est le même mépris !”, s’exclame “instinctivement” à propos de la prison une personne détenue ».
Complétant les données mobilisées par Jean-Marie Delarue et confirmant son diagnostic, l’article d’Annie Kensey réunit et analyse toutes les statistiques pertinentes disponibles aujourd’hui sur la prison et sur ses sortants. Un panorama complet et indispensable.
@ La description que donne Anne-Marie Fixot de l’univers de la prison à partir de son expérience des cours qu’elle y donne, ou essaie d’y donner, recoupe en tout point celle de Jean-Marie Delarue, à cette différence près qu’elle est plus immédiatement dans le ressenti. Dont ce qui se voit en premier est la dimension sinistre. Cette ethnographie fait vivre de l’intérieur, comme si on y était, l’expérience de ceux qui se retrouvent confrontés à la prison.
S’il fallait résumer en un mot ce qui ressort au premier chef de ces deux appréciations, très complémentaires, de l’univers carcéral, celui qui s’imposerait en premier serait sans doute celui de fragmentation. Ou de parcellisation. Fragmentation en types de bâtiments, de traitements, de privilèges, positifs ou négatifs. Fragmentation, surtout, de la vie des détenus, à qui, comme le montre bien Anne-Marie Fixot, il n’est offert la possibilité de faire le lien ni avec ce qu’ils ont vécu avant ni avec ce qu’ils pourraient vivre après. Pour sa part, Jean-Marie Delarue conclut : « C’est, en toute hypothèse, le même mécanisme de parcellisation, de fragmentation (et de quêtes difficiles des personnes concernées qui en sont le corollaire) qui est à l’œuvre. Les parcours qu’on entend faire suivre aux personnes détenues en vue de les faire travailler, les former ou les occuper, ressemblent trait pour trait à ces parcours qu’on a entendu mettre en œuvre pour la réinsertion [16] des chômeurs de longue durée ou des enfants récidivistes, avec leurs incohérences, leurs approches “saucissonnées” du social, de l’économique, du sanitaire, du familial etc., chacune assortie d’injonctions différentes ou contradictoires de celles des autres. Ce que les autres catégories ont le pouvoir d’unifier, parce qu’elles ont la maîtrise au moins partielle de leur usage, en se contentant de pester contre l’aveuglement des guichets, les catégories populaires ne le peuvent pas, en raison de leur dépendance à l’égard des mesures dont elles font l’objet. Il faut naturellement s’interroger sur les caractères propres de la prison. Mais on doit mesurer aussi en quoi la société y trouve son reflet. À cet égard, pour la majorité des détenus, il y a bien continuité [17]. »
Christiane de Beaurepaire, psychiatre, et dont le livre sur son expérience professionnelle à la prison de Fresnes a fait beaucoup de bruit [18], fait quant à elle ressortir un autre trait saillant de la population typique des prisons : non seulement sa fragilité socio-économique mais aussi sa vulnérabilité psychique. « À cette précarité socio-économique, écrit-elle, s’associe une vulnérabilité psychique et psychiatrique, comme en témoignent plusieurs études désormais classiques : plus de 55 % des détenus présentent des troubles psychiatriques à l’entrée en prison, plus de 40 % présentent des antécédents psychiatriques antérieurs à l’incarcération (Drees, 2002). Cette “vulnérabilité” est attestée chez les arrivants et aggravée chez les sortants. Elle apparaît doublement ancrée dans l’état psychiatrique et la précarité socio-économique, eux-mêmes étroitement corrélés. » Un chiffre interpelle tout particulièrement : les hospitalisations psychiatriques des détenus « ont été multipliées par vingt-cinq en quinze ans, dont un tiers en unités pour malades difficiles (UMD). Ces chiffres indiquent à quel point la prison accueille désormais de grands malades, en France comme dans l’ensemble des pays occidentaux, pour des raisons floues et complexes ».

Comment en sortir

De telles données pourraient apparaître décourageantes. Comment à la fois faire exécuter les sanctions méritées dans des conditions de sécurité satisfaisantes et pallier les lourdes insuffisances scolaires, parentales, familiales, professionnelles ou économiques des détenus si, de surcroît, elles se redoublent dans la moitié des cas d’une « vulnérabilité psychique et psychiatrique » ? Pourtant, la réponse qu’apporte Christiane de Beaurepaire est en fait plutôt réconfortante. Elle s’appuie sur l’expérience d’une consultation externe non sectorisée, créée en 2002, dépendant du service psychiatrique d’une grande maison d’arrêt de la région pénitentiaire de Paris. « De 2002 à 2006, six cents personnes ont été suivies, avec des profils psycho-pathologiques divers et des situations socio-économiques médiocres ». Or la conclusion est saisissante : « Une étude menée sur trois cents personnes suivies sur cinq ans a montré qu’il n’y avait eu aucune récidive. »
Voilà qui doit nous encourager à interroger en profondeur à la fois les modalités de fonctionnement de l’institution pénitentiaire et celles qui président à la sortie de prison des détenus, mais aussi à mettre en question l’institution de la prison elle-même et à nous demander dans quelle mesure il est possible d’en sortir.
Sur cette dernière question, comme le montre éloquemment Jean-François Bert, il importe de revenir aux analyses présentées par Michel Foucault dans Surveiller et punir en en comprenant bien le sens et la portée. Ce qui est rendu manifeste au premier chef par Foucault, c’est d’abord la contingence de la prison comme institution : « Pourquoi la prison, résume Jean-François Bert, alors qu’elle n’a jamais été un moyen de punir mieux, ni de punir plus humainement ? Si elle perdure, c’est parce qu’elle est donc la clé de voûte d’une nouvelle technologie du pouvoir qui, avec d’autres institutions comme l’École, l’Asile ou l’Hôpital, permet depuis la fin du XVIIIe siècle un nouvel investissement de la vie quotidienne des individus. » Ou encore : « Pourquoi la prison, alors que ce système punitif a été remis en cause tout de suite et n’a jamais été pensé comme une alternative crédible au système précédent ? Pourquoi la prison demeure-t-elle, et pas seulement en France, la modalité punitive majeure ? » À cette réduction du système des peines à la seule institution carcérale, Foucault trouve tout un ensemble de raisons, bien mises en lumière par Jean-François Bert.
Mais l’essentiel, et on trouve là un fort écho aux thèses de Christian Laval et aux descriptions de Jean-Marie Delarue et Anne-Marie Fixot, réside certainement dans les affinités profondes entre le système carcéral et la dimension de plus en plus disciplinaire de nos sociétés. La prison en est le révélateur, en abyme, et l’exposant. « La société disciplinaire que décrit Foucault, conclut Jean-François Bert, est d’autant plus efficace qu’elle fonctionne sur le mode continu de la surveillance et de la correction des comportements, ce qui nécessite une norme à l’aune de laquelle chaque individu est évalué. Pour bien fonctionner, les dispositifs disciplinaires ont besoin d’un savoir particulier sur les comportements, d’une “orthopédie sociale” mobilisant en même temps la connaissance du parcours singulier de chaque individu et la connaissance comparative des comportements des différents individus au sein d’une population donnée : “L’art de punir […] met en œuvre cinq opérations bien distinctes : référer les actes, les performances, les conduites singulières à un ensemble qui est à la fois champ de comparaison, espace de différenciation et principe d’une règle à suivre. Différencier les individus les uns par rapport aux autres et en fonction de cette règle d’ensemble – qu’on la fasse fonctionner comme seuil minimal, comme moyenne à respecter ou comme optimum dont il faut s’approcher. Mesurer en termes quantitatifs et hiérarchiser en termes de valeur les capacités, le niveau, la ‘nature’ des individus. Faire jouer, à travers cette mesure ‘valorisante’, la contrainte d’une conformité à réaliser. Enfin tracer la limite qui définira la différence par rapport à toutes les différences, la frontière extérieure de l’anormal [19]”. »
S’il y avait un seul texte à lire pour se convaincre que ce n’est pas un souci d’humanité qui a présidé à la naissance de la prison, il suffirait de lire celui de Denis Salas que nous reproduisons ici. Il décrit et dénonce le sort des détenus condamnés à perpétuité, qui n’apparaissent plus que comme des « emmurés vivants » et qui d’ailleurs demandent souvent à être mis à mort plutôt que d’endurer ce qu’ils vivent.
Ils confirment ainsi ce qu’écrivait Beccaria, précurseur de l’utilitarisme benthamien et premier partisan de l’abolition de la peine de mort. Contrairement à ce que l’on pense le plus souvent, ce n’est nullement par humanisme qu’il la préconisait mais, au contraire, parce que dans le calcul des plaisirs et des peines effectué selon lui par les criminels, la peine capitale apparaissait bien trop douce pour être dissuasive. La perspective de la prison serait, expliquait-il, beaucoup plus terrifiante et efficace pour contenir le choix rationnel de la criminalité. Or nous le voyons bien, le calcul utilitariste beccarien ou benthamien se révèle erroné. Loin de réduire la criminalité, la prison la démultiplie. Et, symétriquement, loin de nous faire sortir du cycle de la vengeance en rendant les peines plus humaines, elle institutionnalise une vengeance euphémisée, aseptisée, fonctionnalisée, toujours plus inhumaine, en faisant des détenus non seulement des coupables qui expient leur faute mais aussi des boucs émissaires.
Il est donc urgent, pour commencer, d’aménager le quotidien de la prison et de le faire en ayant comme visée la réussite de la sortie de prison, la préparation à une vie post-prison, possible et décente. Comparant la situation française à celle d’autres pays européens, Anne-Marie Klopp montre, à partir de l’étude des pratiques dans trois établissements pénitentiaires, l’un en Angleterre, l’autre en République tchèque et le dernier en Suisse, « qu’il est tout à fait possible de lier détention et préparation à la sortie ». Sa conclusion, qui rejoint celle de Jean-Marie Delarue et d’Anne-Marie Fixot, est qu’« en France comme dans l’ensemble des pays européens le passage de la réclusion à l’inclusion passe par le relationnel ».
@ C’est également ce que montrent à l’envi les textes de trois des principaux spécialistes français des problèmes de réinsertion, Nicole Maestracci, présidente de la FNARS [20], Jean-Manuel Larralde, professeur de droit public, et Michel Jouannot, membre du Contrôle général des lieux de privation de liberté. Tous concluent à l’inexistence de véritables politiques d’insertion ou de réinsertion au sein des prisons françaises. Celles-ci, on l’a vu, passeraient au premier chef par l’inversion, durant le séjour en prison, d’une politique de la séparation et de la fragmentation systématiques en une politique de socialisation. Car, en dernière instance, là comme ailleurs, ce qui détermine la possibilité de faire ou de refaire des délinquants des membres à part entière d’une communauté démocratique, c’est que possibilité leur soit donnée de donner un sens à leur existence et de trouver une cohérence entre l’avant, le pendant et l’après.
Mais il faut comprendre qu’assigner une telle mission à la prison en bouleverserait radicalement la signification et l’organisation. Dans leur article publié dans l’ouvrage La Sortie de la délinquance (Marwan Mohamed, op. cit.), Lila Kazemian et Thomas P. LeBel observent qu’aux États-Unis (mais les chiffres sont comparables ailleurs), les deux tiers [des ex-détenus] ont été arrêtés à nouveau et près d’un quart réincarcérés, dans les trois ans suivant leur sortie de prison. La conclusion s’impose d’elle-même. Il faut absolument cesser de faire de la prison une fabrique de délinquants, un surgénérateur de délinquance. Pour cela, une mesure essentielle pourrait être « de tenir les dirigeants des établissements pénitentiaires responsables non seulement de la réduction de la fréquence des inconduites mineures en milieu carcéral, mais aussi de l’accroissement du nombre et de la qualité des prises en charge mises à disposition, ainsi que du nombre de détenus et de libérés sous conditions qui participent jusqu’au bout à un dispositif qui, au demeurant, ait fait ses preuves. Ces étapes sont fondamentales pour faciliter une véritable réinsertion sociale et accroître les chances de sortir de la délinquance » (ibid., p. 254). Comme le pointe Fergus Mac Neill dans le même ouvrage, la morale rejoint ici l’efficacité. Seule la reconnaissance des détenus dans leur pleine dignité humaine est susceptible de faire sortir de la spirale infernale qui fait que toujours plus de criminalité entraîne toujours plus de prison et toujours plus de prison entraîne toujours plus de criminalité.
Au-delà, donc, de tous les aménagements souhaitables de la prison et de la sortie de prison, il faut réfléchir à toutes les alternatives possibles de manière à briser l’association automatique entre pénalité et prison qui nous empêche de penser et d’avancer. Le chantier est immense et, nous l’avons dit, nous manquons encore d’études concluantes sur l’efficacité relative des diverses alternatives existantes ou concevables. Mais une des pistes les plus prometteuses est certainement celle de la justice restauratrice (ou réparatrice) que nous présente Jacques Lecomte. Impulsée au Canada il y a plus de trente ans, elle consiste dans la mise en présence, à l’aide d’un médiateur, de la victime (et, le cas échéant de sa famille) et de son agresseur. Elle vise « à donner aux victimes, aux délinquants et à la société le sentiment satisfaisant que “justice est faite”. On peut résumer les effets de cette approche sous forme de trois “R” : Réparation de la victime, Responsabilisation de l’auteur et Rétablissement de la paix sociale ». Un des soucis essentiels des victimes est de comprendre les motivations de leur agresseur et d’en obtenir des excuses. La justice traditionnelle le permet difficilement. En revanche, selon une série d’études australiennes, « 90 % des victimes estiment que l’agresseur doit présenter des excuses. Or 86 % des personnes ayant vécu une justice restauratrice ont dit que leur agresseur avait présenté ses excuses, contre seulement 19 % des victimes passées par le tribunal. De plus, 77 % des victimes en justice restauratrice estimaient que les excuses étaient sincères, contre seulement 41 % des victimes passées au tribunal ». Quant à l’efficacité, Jacques Lecomte rapporte qu’« une méta-analyse synthétisant dix-neuf études d’évaluation de médiations entre victime et agresseur, incluant un total de 9 307 jeunes, constate une réduction de la récidive de 26 % par rapport aux délinquants passés par la justice classique. De plus, les récidives commises par les participants à la médiation sont généralement moins graves. Les principaux facteurs liés à la baisse de la récidive sont le remord éprouvé au cours de la médiation et les excuses présentées aux victimes, le fait d’avoir été impliqué dans le processus de décision, de ne pas avoir été considéré comme une mauvaise personne ». Enfin, et ce point mérite attention, « on pourrait penser, nous dit Jacques Lecomte, qu’il est préférable de limiter la justice restauratrice aux délits mineurs et réserver les crimes graves pour la justice classique. Or les résultats des recherches aboutissent à la conclusion inverse. En effet, les rares cas où l’on a pu observer une hausse de la récidive concerne les atteintes à la propriété sans violence sur les humains ».

Conclusion

Voilà, pour finir, qui nous renvoie à la thématique du pardon dont nous disions en ouverture que c’est à tort qu’on penserait pouvoir l’éliminer de la réflexion sur le statut et le sens de la prison. Une des raisons, nous semblait-il, pour lesquelles le débat sur la prison ne parvient pas à naître, c’est que la conception dominante du pardon, exposée et exacerbée par Vladimir Jankélévitch ou Jacques Derrida est tellement exigeante, dans son refus du repentir des coupables, que personne ne pense pouvoir l’accorder. La prison fonctionne dès lors, logiquement, comme ce lieu où l’on ne pardonne pas. Ni rien ni personne. Par ailleurs, et c’est un autre trait du pardon retenu par Vladimir Jankélévitch, il ne peut être donné que par des personnes, non par des institutions. Cette caractérisation, là encore, est sans doute discutable. La Commission Vérité et réconciliation d’Afrique du Sud, qui fonctionne de la même manière que la justice restauratrice, est bien une institution, dont la raison d’être est justement d’instaurer la possibilité du pardon. Mais ce qui est certain, et qu’attestent les études présentées par Jacques Lecomte, c’est que l’institution ne suffit pas. Ou, pour le dire dans le langage du MAUSS, la socialité secondaire, fonctionnelle, ne peut pas tout. À la justice secondaire, celle de l’institution, il faut adjoindre, autant que faire se peut, ce qu’on pourrait appeler une justice primaire, en face à face et de personne à personne. Et, plus généralement, tous les textes réunis dans ce numéro l’ont montré, seule l’inscription dans des réseaux de socialité primaire, d’interconnaissance et de relationnalité peut permettre à la fois de rendre la prison supportable et de préparer à en sortir réellement.



SOMMAIRE

Présentation  : Alain Caillé et Anne-Marie Fixot

Ouverture  :
Alain CUGNO et GNCP : Prison, ce n’est pas la peine d’en rajouter
Julien RÉMY, L’offense, le pardon et le don
Christian LAVAL, Surveiller et prévenir. La novelle société panoptique

L’horreur carcérale
Jean-Marie DELARUE : Continuité et discontinuité de la condition pénitentiaire
@ Anne-Marie FIXOT : Sortir du sinistre carcéral
Christiane DE BEAUREPAIRE : La vulnérabilité sociale et psychique des détenus et des sortants de prison
Annie KENSEY : Que sait-on de la condition socio-économique des sortants de prison ?

Comment en sortir
Jean-François BERT : « Ce qui résiste, c’est la prison. » Surveiller et punir, de Michel Foucault
Denis SALAS : Abolir la prison perpétuelle
Anne-Marie KLOPP : De la réclusion à l’inclusion. La sortie de prison en Europe
@ Jean-Manuel LARRALDE : Des prisons françaises sous influences
@ Nicole MAESTRACCI : Repenser la sortie de prison
@ Michel JOUANNOT : Prendre au sérieux la réinsertion
Jacques LECOMTE : La justice restauratrice

Libre Revue
Claudine SAGAERT : La laideur, un redoutable outil de stigmatisation
Simon BOREL : Facebook, stade suprême de la quête de reconnaissance
Benjamin BOUDOU : Éléments pour une anthropologie politique de l’hospitalité
@ Stephen KALBERG : La sociologie des émotions de Max Weber
@ Manuel CERVERA-MARZAL : Miguel Abensour, Cornelius Castoriadis. Un conseillisme français ?
Dominque BODIN et Gaëlle SEMPÉ : Faut-il légaliser le dopage ?
Henri RAYNAL : Innombrables sont les voies
Bibliothèque

NOTES

[1Nous remercions Philippe Chanial pour sa relecture de cette présentation, ses suggestions et ses commentaires.

[2Colloque organisé à l’initiative de l’association Démosthène (Association Démosthène pour la citoyenneté-Un espace universitaire de débats), en partenariat avec l’Institut international des droits de l’homme et de la paix (2IDHP) et placé sous la présidence de Nicole Maestracci, premier Président de la Cour d’appel de Rouen, et présidente de la FNARS, et Denis Salas, magistrat, maître de conférences à l’École nationale de la magistrature.

[3Le Groupe national de concertation prison (GNCP) réunit, depuis bientôt dix ans, les représentants nationaux d’associations et des aumôneries de prison afin d’échanger sur un certain nombre de préoccupations communes autour de l’univers carcéral. <http://prisons.free.fr/aquiprofite.htm> .

[4Comme le montre parfaitement le livre d’Hélène Castel, Retour d’exil d’une femme recherchée, préface de Nancy Huston, Seuil, Paris, 2009.

[5Sur lesquels nous savons pour l’instant assez peu de choses. L’ouvrage le plus synthétique sur la question est La Sortie de délinquance, sous la direction de Marwan Mohamed, La Découverte, « Recherches », Paris, 2012.

[6Pour une description fine de la conception, propre à l’« utilitarisme pénal » et au néolibéralisme contemporains, du « délinquant rationnel » et de ses conséquences sur la conception même de la loi, du crime et de la peine, voir les fines remarques de Denis Salas, La Justice dévoyée. Critiques des utopies sécuritaires, Les Arènes, Paris, 2012, chap. II.

[7En allemand, c’est le même mot, Schuld, qui désigne la dette et la faute.

[8Extrait de sa thèse de doctorat en sociologie qui analysait le rapport des enfants issus de l’immigration à la dette – la dette en trop – que la société française fait peser sur eux.

[9Qui, chez Derrida, ne fait que radicaliser et exacerber une conception elle-même hyperbolique du don.

[10Sur le pardon, on lira avec profit le chapitre III de La Bonté humaine, de Jacques Lecomte, Odile Jacob, Paris, 2012.

[11Dont le sous-titre est Naissance de la prison.

[12Voir Michel Foucault, Surveiller et punir, Gallimard, « Bibliothèque des histoires », Paris, 1975, p. 201.

[13Dans une conférence destinée aux lycéens mais qui se révèle être sans doute la meilleure introduction possible à l’œuvre désormais importante, riche et variée, de Christian Laval lui-même.

[14Voir notamment La Nouvelle raison du monde. Essai sur la société néolibérale, La Découverte, « Poche », Paris, 2010.

[15Sur la critique de l’idéologie du mérite et sur ses liens avec l’utilitarisme, cf. Dominique Girardot, La société du mérite, Le Bord de l’eau, 2011.

[16« Le terme est identique et ceux qui l’emploient devraient en expliciter le sens », note Jean-Marie Delarue.

[17À lire ces analyses, il est difficile de ne pas se demander si la prison n’a pas préfiguré et si elle n’exacerbe pas les traits de ce que je (A.C.) présente comme la forme socio-politique et symbolique actuellement dominante et que je qualifie de parcellitarisme pour désigner un régime qui s’écarte autant de la démocratie, par la mise en parcelles des institutions, des groupes ou des individus, que le totalitarisme s’en éloignait par leur fusionnement permanent et forcé (voir Alain Caillé, « Démocratie, totalitarisme et parcellitarisme », Revue du MAUSS semestrielle, n° 25, 2005, 1er semestre ; et « Un totalitarisme démocratique ? Non, le parcellitarisme », in Alain Caillé (dir.), Quelle démocratie voulons-nous ? Pièces pour un débat, La Découverte, « Sur le vif », Paris, 2006). À quoi il conviendrait d’ajouter, que ces régimes fonctionnent également à la peur et que c’est là, avec la fragmentation, l’autre ressort majeur de la prison.

[18Christiane de Beaurepaire, Non-lieu, un psychiatre en prison, Fayard, Paris, 2009. Elle y dénonce et questionne « la démission des politiques sanitaire et sociale, l’indifférence des responsables et la destruction du dispositif de santé publique ».

[19Michel Foucault, Surveiller et punir, op. cit., p. 214.

[20Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale.