Revue du Mauss permanente (https://journaldumauss.net)

Stanislas Deprez et Pierre Giorgini

La révolution endo-contributive comme solution à la crise ?

Texte publié le 8 juin 2020

Le présent article suggère qu’une solution à la crise économique, écologique et politique qui frappe les sociétés contemporaines tient à un changement de modèle de gestion des collectifs. Nous serions en train de passer de l’exo-distributivité, caractérisée par la hiérarchie et la rétention de l’information, à l’endo-contributivité, définie par l’intelligence collective, la co-élaboration et la décentralisation. Cette transformation est appelée par un changement d’épistémè : le lien tend à devenir le concept central d’intelligibilité du monde. Cela rend pensable la refondation des sociétés contemporaines sur l’endocontributivité.
Stanislas Deprez est docteur en philosophie et diplômé en anthropologie et en sociologie (UCLouvain). Il est chercheur associé de la chaire « Ethique, technologie et transhumanismes » de l’unité de recherche ETHICS (EA 7446) de l’Université Catholique de Lille.
Pierre Giorgini est ingénieur. Président-Recteur de l’Université Catholique de Lille, il est aussi chercheur associé de la chaire « Ethique, technologie et transhumanismes » de l’unité de recherche ETHICS (EA 7446) de l’Université Catholique de Lille.
Bien qu’il constitue une réflexion originale, cet article repose sur les travaux de l’un des deux auteurs, à paraître dans un ouvrage : Pierre Giorgini, L’onde et le corpuscule [Giorgini, 2020]. Nous nous permettons d’y renvoyer le lecteur désireux de plus amples développements des idées discutées dans le présent texte.

Pour nombre d’observateurs, nous devons nous préparer à vivre une crise écologique majeure, conjuguant réchauffement climatique, pollution et perte de biodiversité. Les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en anglais) ne laissent planer aucun doute à ce sujet. À cela s’ajoute une situation économique qui nourrit les doutes de beaucoup quant à la capacité du marché et des Etats à assurer le bien-être de la population mondiale, sans inégalités criantes, crises à répétition et pillage des ressources. D’où un problème de confiance dans les institutions, singulièrement dans les régimes démocratiques : non seulement le politique paraît impuissant à apporter la moindre réponse à ces défis majeurs mais il semble lui-même être une partie du problème.

Pourtant, des solutions paraissent se dessiner. Des voix s’élèvent, de plus en plus fortes, pour réclamer une remise en cause de nos modes de développement : agriculture biologique, distribution en circuits courts (du producteur au consommateur), éthique d’entreprise, cogestion, prise en compte de la pollution dans la comptabilité, décroissance, production locale de l’énergie, bâtiments zéro-émission, etc. Au niveau politique aussi, des revendications se font jour pour plus de démocratie directe, via les conférences-citoyennes, les référendums, etc.

Ces solutions permettront-elles de répondre à la crise généralisée (écologique, économique et politique) que nous connaissons ? Nous pensons qu’il est raisonnable de répondre à cette question par l’affirmative. Pour cela, nous faisons deux hypothèses, qui sont l’objet de cet article. En premier lieu, nous pensons que la crise est en son fond un problème de gestion : le modèle classique de gouvernement, que nous nommons exo-distributif et qui se caractérise par la hiérarchie et la rétention de l’information, montre ses limites. Un nouveau modèle émerge, que nous appelons endo-contributif et qui se définit par l’intelligence collective, la co-élaboration et la décentralisation. Notre seconde hypothèse est que ce modèle endo-contributif, mieux adapté aux défis de notre époque, se généralisera, car il repose sur un changement d’épistémè.

1. Du modèle exo-distributif au modèle endo-contributif

Il existe de nombreuses tentatives, théoriques et pratiques, qui cherchent à répondre à la crise par une révolution contributive : co-élaboration, décentralisation, participation directe de toutes les parties prenantes (stakeholders), etc. Leur intuition sous-jacente est que le modèle classique de pilotage de nos sociétés est au moins partiellement obsolète. Nous appelons ce modèle exo-distributif, du grec « exo » qui signifie « hors de », et du latin « distributives », « qui répartit les choses ». L’exo-distributivité se définit par la centralisation, la hiérarchisation et la rétention d’information. Les échelons inférieurs recueillent les données et les transmettent aux échelons supérieurs, qui les agrègent avec d’autres données et les envoient au niveau plus élevé, jusqu’à ce qu’on arrive au poste de commandement, seul à disposer de toute l’information. Pour cette raison, c’est le dirigeant qui prend les décisions, lesquelles sont transmises aux échelons inférieurs, qui les exécutent sans forcément les comprendre. Ce modèle a caractérisé toutes les sociétés complexes pendant des siècles. On le retrouve dans l’organisation de l’armée, des entreprises, des gouvernements, etc. Il présente l’avantage de permettre de collecter toutes les informations et d’éviter de diluer les décisions. Ce modèle a été très performant, lorsque les canaux d’information étaient limités et arborescents.

Or cette situation n’est plus la nôtre, depuis quelques décennies. En effet, la diffusion massive de l’internet a rendu l’information aisément accessible par (presque) tous, ce qui a eu pour effet de transformer la manière de fabriquer l’expertise. Un nouveau modèle émerge, que nous proposons de nommer endo-contributif, terme composé du grec « éndon », « dans », et du verbe latin « contribuere » signifiant « fournir pour sa part ». L’endo-contributivité désigne un mode de gestion décentralisé, non-hiérarchique et co-élaboratif : l’information est diffusée à tous les acteurs du système, qui interagissent pour produire une intelligence que l’on peut qualifier à bon droit de collective, parce qu’elle est plus que la somme des décisions individuelles. Donnons quelques exemples, délibérément choisis dans des sphères d’activité très diverses. Des collectifs de patients se constituent pour défendre leurs droits par rapport aux médecins et aux firmes pharmaceutiques, entre autres en produisant de l’expertise alternative au corps médical [Stengers et Ralet, 1991]. La remise en cause de la toute-puissance des praticiens par les patients s’est accrue grâce à l’internet, rendant accessible de très nombreuses informations médicales sur les maladies, les examens et les traitements éventuels. Les progrès informatiques n’ont pas seulement favorisé la diffusion des informations. Ils ont aussi entraîné la diminution des coûts de production, permettant la multiplication des Fablabs, espaces où quiconque peut utiliser des machines-outils pour un prix modique. Or s’ils mettent à disposition des outils, ces laboratoires collaboratifs visent d’abord l’apprentissage mutuel et l’échange des connaissances entre utilisateurs, chacun étant considéré comme expert de son propre savoir et apte à faire bénéficier les autres de son expérience. Sur l’internet, les Wiki fonctionnent de cette manière, avec des résultats plutôt probants, comme le montre l’exemple de l’encyclopédie contributive Wikipedia.

La prise de pouvoir par tout un chacun se constate aussi en politique, même si c’est encore balbutiant. Les conférences citoyennes se multiplient, qui visent à faire prendre des décisions par des hommes et femmes « du commun ». Sans être dupes des récupérations possibles – débats sans enjeu réel, décisions prises à l’avance, etc. –, il faut reconnaître que ces conférences, comme d’autres dispositifs (référendums, tirage au sort, etc.) permettent de rapprocher le politique des citoyens. Un autre défi, à la croisée du politique et de l’économique, consiste à amener la production du global au local. Cela ne concerne pas seulement l’agriculture et l’élevage, mais aussi la production et la distribution de l’énergie. Il n’en va pas seulement d’un changement d’échelle, de la nation à la (sous-)région. Ce qui est mis en question, c’est la nécessité d’en passer par une instance suprême, ce que les économistes nomment un tiers de confiance. La plus étonnante illustration de ce principe est peut-être le bitcoin et les monnaies équivalentes (électroniques ou autres, comme le SEL) qui entendent faire reposer la fiabilité de la monnaie sur l’ensemble de la communauté des utilisateurs, en se passant d’une instance étatique (Federal Reserve, BCE ou banque nationale).

Que ces projets puissent susciter des questionnements et des réserves va sans dire. Rien n’indique que le vieux projet libertarien de suppression de l’Etat et de son remplacement pur et simple par des groupes d’utilisateurs auto-organisés entraîne d’avantage d’égalités et une meilleure répartition des ressources, en particulier en faveur des plus pauvres. Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit ici. Il n’entre pas dans nos intentions de contester l’utilité de l’Etat. Notre propos concerne seulement le mode de gestion. De ce point de vue, il nous semble que l’endo-contributivité est plus efficiente que l’exo-distributivité. Elle est plus rapide, puisque l’information y est en prise directe sur l’action. Elle repose sur une intelligence située, plus concrète car plus proche du lieu de la décision, et faisant ainsi appel à une raison enrichie par les passions. Elle est aussi moins sujette à la persistance des erreurs, celles-ci ayant plus de chances d’être corrigées : la probabilité de trouver des personnes capables de comprendre les erreurs et d’y remédier est par définition plus élevée dans le modèle endo-contributif – où tout le monde est partie prenante et a accès à l’information – que dans le modèle exo-distributif – où seuls quelques personnes dirigent et sont considérées comme expertes. Cela suppose évidemment que l’information puisse être communiquée très rapidement et en parallèle, c’est-à-dire de manière décentralisée. Ce qui est aujourd’hui techniquement possible, du moins dans les pays possédant un réseau électrique et un réseau informatique en état de fonctionner.

Techniquement possible ne signifie pas socialement et politiquement réalisé. La Chine, la Russie, l’Iran ou la Corée du Nord sont capables – dans une mesure plus ou moins grande – de limiter l’internet au territoire national, afin d’exercer un contrôle politique des citoyens. L’endo-contributivité n’a rien d’inéluctable. Pourtant, il n’est pas absurde de penser qu’elle va se généraliser parce qu’elle est en phase avec, et comme appelée par, un changement d’épistémè, qui s’est lentement produit au xxe siècle et qui s’accroît en ce début de xxie siècle. Telle est notre seconde hypothèse, qu’il nous faut à présent expliciter.

2. Une nouvelle épistémè : le lien

En introduisant le terme d’épistémè dans Les mots et les choses [Foucault, 1998 (1966)], Michel Foucault a voulu qualifier la vision globale d’une époque, les problématiques qu’elles retient, les méthodes de recherche qu’elle sélectionne et les hypothèses qu’elle pose. L’épistémè a donc une portée générale. On se souvient que Foucault distinguait trois épistémè pour l’Occident : la Renaissance était dominée par la « similitude » (analogies et ressemblances) ; le xviie siècle était centré sur « l’ordre » (les classifications) ; la fin du xviiie siècle mettait en avant « l’histoire » et faisait de l’homme un objet d’étude. Nous sommes en train de sortir de cette époque. L’idée ne sera sans doute pas évidente pour tous. Foucault lui-même avait fini par juger son concept d’épistémè trop général, à tort selon nous. D’autres arguent du retour du sujet en philosophie et dans les sciences sociales, ou de l’avènement de l’anthropocène, qui est une manière de désigner l’impact historique de l’humain sur la nature. Pourtant, notre temps se laisse moins éclairer par l’histoire que par le lien. Le xixe siècle expliquait la société en terme de développement historique : progrès des Lumières, philosophie hégélienne de l’avènement de l’Esprit absolu, constitution d’Etats-Nations, anthropologie évolutionniste, etc. Il se servait du même cadre pour appréhender la nature : transformisme puis évolutionnisme darwinien en biologie, thermodynamique en physique, etc. Aujourd’hui, c’est le lien qui est mis en évidence dans les sciences de la nature et de la société. C’est une nouvelle vision du monde qui se découvre dans toutes les disciplines.

Cette thèse d’une nouvelle épistémè ne signifie aucunement que le lien n’avait pas été évoqué avant le xxe siècle. Pour ne prendre que quelques exemples, il jouait un rôle important chez Aristote (l’homme comme animal politique), Leibniz (la monade comme point de vue sur toutes les autres monades) ou Hegel (la dialectique du maître et de l’esclave). Par ailleurs, les analogies, les classements et l’histoire restent des outils pertinents. Ce qui est neuf n’est donc pas l’introduction du concept de lien mais la centralité qu’il occupe à présent dans le projet d’intelligibilité du monde et de l’humain.

C’est d’abord dans les sciences de la nature que l’idée de lien se fait jour. On peut considérer que la physique classique était globalement fondée sur le lieu – un corps occupant une portion d’espace, à l’exclusion de tout autre corps – et la causalité linéaire : le déplacement d’une particule cause, par « choc », le mouvement d’une autre. La physique quantique a bouleversé cette conception, en faisant primer le lien sur le lieu. C’est aussi la leçon de la théorie des cordes. Selon cette conception – certes controversée mais significative d’un changement d’épistémè –, les particules de matière se réduiraient à des cordelettes vibrantes, c’est-à-dire des paquets d’ondes confinées. La réalité serait ainsi un tissu de liens, qui donnent l’impression aux observateurs que nous sommes d’être de la matière solide spatialement située (comme dans un tableau impressionniste, qui de loin montre des objets – arbre, personnage, etc. – mais qui est en fait constitué de taches de couleurs juxtaposées [1]).

En biologie aussi, le lien est devenu déterminant. C’est évident en écologie, puisque cette discipline étudie les interactions entre les membres d’un environnement. Poussant cette idée à son acmé, James Lovelock a proposé de considérer la Terre comme un organisme vivant, intelligent et autorégulé, dont nous serions des parties constituantes [Lovelock, 1999 (1988)]. Dans la même perspective, des botanistes ont soutenu récemment que les arbres « collaborent » contre les parasites en émettant des signaux chimiques qui « préviennent » les arbres environnants, lesquels réagissent aux parasites avant même d’être attaqués. Peter Wohlleben est devenu célèbre pour voir présenté cette idée au grand public dans La vie secrète des arbres [Wohlleben, 2017 (2015)]. Le langage de cet ouvrage, délibérément anthropocentré, excède certainement les données. Mais cette outrance est tout à fait significative, puisque les arbres sont décrits à partir des liens qu’ils entretiennent avec les autres et non comme le résultat temporaire d’une compétition pour la survie. Le changement d’épistémè se marque aussi en biologie évolutionniste. Nous en voulons pour indice un livre publié il y a quelques années, qui proposait de dépasser les impasses de la théorie néodarwinienne de l’évolution en partant des interactions des organismes entre eux, la compétition devenant une forme de relation parmi d’autres [Lodé, 2014].

La redescription en termes de lien ne touche pas seulement les relations entre les organismes, elle s’applique aussi aux organismes eux-mêmes. Les êtres vivants sont désormais présentés comme des collectifs. L’humain, auparavant décrit comme une individualité autosuffisante – à partir de l’opposition entre soi et non-soi – est à présent perçu comme un écosystème constitué d’organismes et de cellules en co-élaboration. On a mis en évidence l’importance du microbiote intestinal, ensemble de micro-organismes plus nombreux que les cellules du corps, spécifiques à chaque être humain et sans lesquels celui-ci ne saurait vivre. Ces organismes, qui ne sont pas nous, nous constituent pourtant, puisque nous mourrions sans eux. La représentation du cerveau humain a elle aussi subi pareille mutation conceptuelle : longtemps présenté comme l’organe de la pensée, le cerveau est vu aujourd’hui comme s’étendant à tout le système nerveux, c’est-à-dire à l’entièreté du corps. En outre, on a découvert un système nerveux lié à l’estomac. Et le siège de la pensée, conçu dans la perspective cartésienne comme le lieu d’où l’esprit commande au corps, est davantage représenté actuellement comme une société [Minsky, 1988 (1986)] formée de nombreux agents collaborant pour construire les pensées de haut niveau et prendre les décisions.

L’évolution de l’éthologie ces dernières années va dans la même direction, et elle est très significative pour notre propos. Science du comportement animal et humain, l’éthologie est passée d’une étude de la causalité instinctive à une description des interactions. Ainsi les spécialistes des chimpanzés et des bonobos ont-ils fait valoir que la vie du groupe repose sur une négociation continue et des alliances subtiles. Toutefois, les grands singes étant des animaux sociaux, on peut s’attendre à ce qu’ils tissent des liens. Le vol des étourneaux fournira un exemple plus significatif, en mettant en valeur ce que nous entendons par endo-contributivité. Les étourneaux volent en formant des nuées regroupant parfois plusieurs centaines d’individus. Si cela permet de désorienter les prédateurs, un autre avantage est l’accroissement de la capacité à détecter un abri : dès qu’un étourneau se dirige vers un arbre, les oiseaux les plus proches le voient et l’imitent, et ainsi tout le groupe est rapidement informé, sans qu’il y ait besoin d’un leader qui commande le mouvement. Encore plus étonnant, les collisions entre étourneaux sont extrêmement rares, chaque oiseau s’alignant instinctivement sur ses congénères en respectant une distance particulière. Le groupe peut ainsi évoluer dans l’air sans plan de vol [Ornithomedia, 2010]. Et même si les chercheurs ne comprennent pas encore les mécanismes précis permettant une telle prouesse, on a ici un bel exemple de co-élaboration décentralisée et non hiérarchique.

La centralité du lien ne se constate pas seulement dans les sciences de la nature. Elle a aussi pris une place fondamentale dans les sciences de l’ingénierie, avec la cybernétique, qui fut à l’origine d’une refonte des sciences humaines. La cybernétique est née pendant la Seconde Guerre mondiale, lorsque Norbert Wiener fut chargé de concevoir un dispositif de défense anti-aérienne, particulièrement difficile à imaginer puisque la cible a un mouvement inconnu du tireur. Wiener eut l’intuition géniale que la solution résidait dans le réajustement permanent de l’anticipation de la trajectoire de la cible. Ce qui nécessitait de concevoir le canon de DCA, le radar d’acquisition et la cible comme autant de parties prenantes d’un unique système. Wiener et d’autres, dont John von Neumann, tirèrent les conséquences théoriques de ce saut conceptuel, en redéfinissant la réalité en termes de systèmes d’interactions. Autrement dit, le réel est appréhendé non comme une addition d’individus juxtaposés mais comme une multitude de liens plus ou moins forts, constitutifs de l’identité.

Donnons un exemple pour mieux faire saisir le changement de vision. La conception de systèmes techniques et informatiques pour piloter des réseaux de mobiles, par exemple des portes conteneurs, s’appuyait dans les années 80 sur de puissants logiciels centralisés qui optimisaient les mouvements (vitesse, direction) grâce à un mapping en temps réel de tous les mobiles et un pilotage optimisé de chacun d’eux par une commande unique et centrale. Le système était bien exo (intelligence externe au réseau) et distributif (distribution des ordres de pilotage de l’extérieur). Aujourd’hui ce sont les « google car » qui embarquent l’intelligence et co-contribuent par ajustement mutuel à l’intelligence globale du réseau de voitures sans chauffeur. On est bien endo (intelligence embarquée par chaque mobile) et contributif (contribution de chaque mobile à la performance du tout)

Cette conception de la réalité comme ensemble d’interactions fut ensuite appliquée aux systèmes vivants et notamment aux humains. Ainsi, l’anthropologue Gregory Bateson s’est-il emparé des travaux des cybernéticiens pour redéfinir la schizophrénie comme une production des interactions d’un système familial : pour Bateson, le schizophrène n’est pas un individu malade dans une famille saine, il est le symptôme d’un désordre familial – désordre du point de vue de la souffrance engendrée, chez le patient et chez les autres membres de la famille. La cybernétique a aussi exercé une forte empreinte sur fonctionnalisme de Talcott Parsons, qui domina la discipline dans les années 1950 et 1960. Le sociologue américain faisait de l’individu le produit d’un ordre qui le dépasse et le définit. Cette idée d’une identité individuelle constituée par la relation, si elle est contraire à l’individualisme méthodologique dominant en économie, occupe une place centrale dans les autres courants de la sociologie. Ainsi la sociologie critique issue de Pierre Bourdieu, parfois qualifiée de structuralisme génétique parce qu’elle cherche à penser la structure dans sa dynamique, est fondée sur l’idée que le réel social est relationnel. Dans un autre cadre théorique, des auteurs comme Serge Paugam [2018] ou Jean-Michel Le Bot [2010] posent la question du lien social et du vivre ensemble dans un début de siècle caractérisé par l’inégalité. Inspiré quant à lui par la perspective de Touraine, le sociologue espagnol Manuel Castells [1998 (1996)] entend repenser le sujet et la société à partir des réseaux.

L’anthropologie n’est pas en reste. Le structuralisme, qui a dominé la discipline dans la seconde moitié du xxe siècle, et qui garde une indéniable importance, est une pensée du lien : l’apport méthodologique et conceptuel majeur de Lévi-Strauss consiste à considérer les éléments non en eux-mêmes mais dans les rapports qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Cette anthropologie de la discontinuité succédait à une autre anthropologie de la relation, développée par Lucien Lévy-Bruhl, théoricien de la notion de participation. La participation désigne l’identité entre deux êtres qui paraissent étrangers l’un à l’autre (par exemple, un chasseur et ses armes, ou un homme et un kangourou). Autrement dit, elle tente de penser les continuités, là où le structuralisme veut saisir les discontinuités.

3. Un approfondissement de l’humanisme

Si l’approche par le lien n’a pas suscité de controverse dans les sciences de la nature, il n’en a pas été de même dans les sciences sociales. Elle a parfois été jugée anti-humaniste au motif qu’elle dénaturerait le sujet en gommant sa liberté, sa conscience et sa capacité d’agir en propre. Le livre de Céline Lafontaine sur la cybernétique est exemplaire de ce reproche, la sociologue canadienne n’hésitant pas à voir dans ce courant la préfiguration d’un posthumanisme anti-humaniste [Lafontaine, 2004]. L’accusation n’est pas sans fondement, dans la mesure où ces courants cherchent en effet à objectiver le social, c’est-à-dire à trouver des déterminations et des causes objectives aux comportements sociaux. Cette défense de l’humanisme rejoint la récente critique de Jean-Pierre Digard faite aux courants animalistes, typique de ce que l’on peut lire sous la plume des tenants d’une séparation stricte entre humains et animaux [Digard, 2018]. On soulignera avec l’auteur l’importance de ne pas dévaloriser l’humain, qui n’est pas moins digne de respect que les autres êtres vivants, et qui mérite au moins autant de soin que l’environnement. Pourtant, Digard et les partisans de l’humanisme classique – on pourrait évoquer Francis Wolff, auteur de plusieurs livres sur le sujet – nous semblent passer à côté de l’essentiel, en assimilant à de l’anti-humanisme ce qui est pour une part un déplacement de l’humanisme. L’animalisme a le mérite d’inviter au décentrement, à partir de l’environnement naturel. De même, la cybernétique, la systémique et le structuralisme poussent à repenser l’humain à partir de l’environnement social et technologique. Plutôt que de rejeter ces courants, nous pensons qu’il serait judicieux de les prendre pour un approfondissement de l’humanisme. En effet, l’humanisme classique repose sur le modèle de l’individu libéral, maître et possesseur de lui-même. Or une approche à partir des systèmes empêche de considérer les individus comme des êtres a priori autonomes et indépendants, dont les seules formes de relation sont le contrat et l’échange marchand. En portant le regard sur « ce qui passe » entre (et dans) les individus, on est amené à concevoir ces derniers comme d’emblée en relation, traversés de part en part par le lien, et constitués par lui. Ces courants seraient donc moins la marque d’un anti-humanisme ou d’un posthumanisme signant la mort de l’homme par sa dévalorisation – sa redéfinition en tant que simple animal ou pure machine – que la reformulation de l’humanisme à partir du lien. Autrement dit, le changement d’épistémè que nous voyons à l’œuvre ne mènerait pas à une régression de l’humanisme mais à son développement, plaçant la relation au cœur de l’humain.

Il faut tirer de ces analyses une dernière conséquence. Si notre époque est effectivement marquée par un changement d’épistémè, autrement dit si nous appréhendons de plus en plus la réalité naturelle et sociale en terme de liens, alors il peut paraître sensé de risquer une troisième hypothèse : le changement ne sera pas uniquement théorique, il sera aussi pratique. Voir le monde comme un ensemble de liens pousse à agir pour créer du lien – de la même manière que les acteurs politiques du xixe siècle agissaient « pour faire l’histoire ». Plus précisément, ce qui se découvre aujourd’hui, ce n’est pas n’importe quelle forme de lien, c’est une relation endo-contributive, autrement dit co-élaborative, non hiérarchique et entrelaçant l’information et l’action (ce sont les mêmes acteurs qui commandent et qui exécutent). D’où la question : notre société peut-elle être repensée à partir de l’endo-contributivité ?

4. Possibilité d’une société endo-contributive

Résumons-nous. Nous sommes partis du constat d’une crise multidimensionnelle : économique, environnementale et politique. Nous avons décelé qu’un des éléments de la crise est le modèle de gestion exo-distributif, qui paraît s’essouffler dans nos sociétés démocratiques, fortement éduquées et dotés d’outils de communication performants. Nous avons noté qu’un nouveau modèle de gestion s’esquisse, endo-contributif, qui se caractérise par le partage d’information, la décentralisation et la co-élaboration. Pour le dire de façon plus ramassée, l’endo-contributivité repose sur le lien, entendu comme la capacité à partager ses ressources pour créer du commun et de l’intelligence collective. Ce qui permet de se confronter aux problèmes posés par la crise d’une manière différente, peut-être plus efficace.

Dans un deuxième temps, nous avons fait l’hypothèse que le modèle endo-contributif est en phase avec un changement d’épistémè, au sens de Foucault. En effet, tout au long du xxe siècle, tant les sciences de la nature que les sciences sociales ont intégré le lien, voire en ont fait l’élément clé de leur discours. Certes, le lien dont il s’agit n’est pas forcément ce que nous avons défini par endo-contributivité. Mais il est tout à fait significatif que la relation soit devenue un concept clé de la physique et que les êtres vivants soient repensés à partir de la collaboration. Tout comme il est remarquable que l’éthologie devienne une science sociale, et que la sociologie et l’anthropologie se reformulent à partir de la collaboration.

Si notre supposition est correcte, il semble qu’il existe un cadre de pensée propice à un changement de modèle de gestion de nos sociétés. Par ailleurs, les outils informatiques rendent possible un partage généralisé des informations et des décisions. Est-ce à dire que nous assisterons bientôt à un basculement vers le modèle endo-contributif ? Peut-être.

Précisons que ce mode de gestion n’est pas tout à fait neuf, loin s’en faut. Par son rejet de la hiérarchie, il s’apparente au type de gouvernement des sociétés de chasseurs-cueilleurs, reposant sur l’auto-organisation et le refus de la captation du pouvoir par une élite. Il fait aussi songer à la démocratie grecque antique, telle que la décrit Josiah Ober : une coopération permettant à un grand nombre d’individus d’atteindre des buts communs, sans devoir obéir à un dirigeant [Ober, 2017 (2015)]. Bien évidemment, cette affirmation est à nuancer, puisqu’on sait que le système démocratique grec aurait été impossible sans une masse d’esclaves qui dispensaient les citoyens de travailler, leur permettant ainsi de se consacrer à la politique (et à la guerre). Malgré cela, la Grèce constitue l’exemple de démocratie directe à une vaste échelle le plus abouti. Après la conquête de la Grèce par Philippe de Macédoine, les sociétés occidentales ont toutes adopté le mode de gestion exo-distributif, que ce soit les empires, les royaumes féodaux ou les sociétés des Temps modernes. La taille du territoire et celle de la population empêchent une gestion endo-contributive, faute de moyens de communication assez performants. Cela ne signifie pas que la communication explique à elle seule le mode de gestion, bien entendu. Il existe certainement d’autres facteurs : sociaux, économiques, culturels, religieux, etc. Toutefois, la technologie, et surtout les techniques de diffusion de l’information, jouent un rôle crucial. Comment prendre des décisions de manière co-élaborative quand les déplacements de personnes ou de courriers demandent des jours ou des semaines ? Or sur ce point, l’essor des moyens de transport d’abord, l’informatique ensuite, changent indéniablement la donne. L’internet, en particulier, favorise la décentralisation, l’échange non-hiérarchique et la diffusion de l’information et du savoir, tous facteurs nécessaires à la co-élaboration. De sorte qu’un basculement vers davantage d’endo-contributivité est possible. Ce qui ne veut absolument pas dire qu’il est certain. Les sociétés ne sont jamais déterminées mécaniquement par la technologie, elles absorbent et transforment les techniques autant qu’elles sont changées par elles. En outre, l’usage de l’informatique ne garantit pas par soi-même un accroissement de la co-élaboration et du partage, loin de là.

Les risques de dévoiement ou de récupération des outils de communication sont nombreux, comme le montre un regard sur l’actualité. Au nom de la sécurité, les Etats mettent en place la surveillance des données, la reconnaissance faciale, la prédiction algorithmique de la délinquance, etc. Ce qui contribue au maintien d’un mode de gestion exo-distributif. Sous couvert de faciliter la vie des utilisateurs, les GAFA et autres méga-entreprises informatiques ont installé des programmes (algorithmes et bases de données) qui conduisent à une restriction des libertés, un amenuisement des choix individuels et davantage de conformisme. Si bien que chacun consomme peu ou prou la même chose que les autres, tout en croyant être original. D’autres risques existent, comme la tyrannie de la majorité ou la prise de pouvoir par un leader implicite. L’absence de chef reconnu n’implique pas forcément l’égalité entre tous les membres d’une organisation, ni une distribution équitable du pouvoir, mais signifie seulement que celui-ci fait l’objet d’une reconquête permanente, au prix d’une instabilité. Celle-ci peut mener au délitement, à l’instar des partis des pirates. Technophiles, ces partis entendaient instaurer plus de transparence en politique et la démocratie directe grâce à l’usage intensif de l’internet. Or, après un engouement concrétisé par l’élection de plusieurs représentants aux niveaux nationaux ou européen, ces partis se sont effondrés, sans doute en raison de propositions trop ciblées sur les jeunes urbains, mais aussi à cause de leur mode de prise de décision participatif. Une semblable logique se retrouve dans les mouvements citoyens. Si les Indignés espagnols ont réussi à se transformer en parti politique, il n’en a pas été de même avec d’autres mouvements contestataires tels Occupy Wall Street aux Etats-Unis ou les Gilets jaunes en France. Issus de protestations spontanées, souvent diverses, parfois contradictoires et agglomérées de manière contingente, ces mouvements ont dû leur existence davantage au refus des pouvoirs en place de les écouter que de leur cohérence interne. Ce qui ne leur a pas permis de former un groupe organisé pérenne.

Le risque le plus sournois tient à l’utilisation des techniques de communication décentralisées et co-élaboratives par des gens qui portent la demande d’un Etat fort et centralisé (Trump, Orban, Salvini, Le Pen, etc.) ou qui en tirent un profit exclusivement personnel, comme le Mouvement 5 Etoiles (M5S) tel que l’analyse Giuliano da Empoli [da Empoli, 2019]. On sait que le M5S est né de la rencontre du comique italien Beppe Grillo avec le spécialiste de la communication digitale Gianroberto Casaleggio. L’intuition de ce dernier consistait à proposer des idées politiques émises par « le peuple », c’est-à-dire des citoyens, et qui recueillent l’assentiment d’un grand nombre de personnes. Pour cela, les idées sont énoncées sur un blog, et celles qui suscitent des commentaires sont retravaillées et réinjectées sur une plateforme internet. Les contributeurs ont ainsi l’impression qu’ils font de la politique sans devoir passer par le lourd appareil d’un parti. Mais en réalité, le pouvoir est détenu par Gianroberto Casaleggio, et depuis son décès en avril 2016 par son fils et héritier Davide. Ce dernier contrôle la plateforme internet du M5S et sa base de données, avec le pouvoir d’en exclure qui il veut. D’autres dispositions juridiques font que les élus du M5S sont tenus de suivre la ligne du mouvement, c’est-à-dire les décisions prises par Casaleggio. Sous l’apparence d’un mouvement politique auto-organisé, le M5S est une organisation hiérarchique extrêmement centralisée, d’où sont éliminés les contre-pouvoirs intermédiaires (élus, responsables de sections locales, etc.). Et cela au nom d’une proximité proclamée, et en partie réelle, du chef avec ses militants. Pourtant, nous sommes très loin d’une démocratie directe, car le peuple est réduit aux sympathisants du mouvement, et parce que le dirigeant peut manipuler à sa guise les messages qui apparaissent sur la plateforme.

L’exemple du M5S incite à la prudence. Il prouve qu’il ne suffit pas de prétendre être à l’écoute du plus grand nombre, ou d’avoir l’air d’être participatif, pour être réellement co-élaboratif. Il a pourtant une vertu, en ce qu’il révèle que ce n’est pas l’endo-contributif qui est mauvais en soi mais son détournement au profit de leaders exclusifs. En effet, dans le cas du M5S, la co-élaboration est en fait moindre que dans les systèmes classiques de délibération, puisqu’une pseudo-co-élaboration est invoquée pour court-circuiter le débat contradictoire. Nous avons affaire ici à un renforcement du modèle exo-distributif sous un masque de co-élaboration.

Ces divers risques nous offrent a contrario quelques règles nécessaires à une gestion endo-contributive qui aille au-delà des mots et des bonnes intentions. Il faut acter le fait que les dispositifs matériels de la discussion et de la gestion des décisions ne sont jamais neutres ; elles doivent donc être expliquées clairement à tous les inter-actants, qui doivent avoir le droit et la possibilité de les redéfinir au besoin. La gestion endo-contributive nécessite aussi la présence de contre-pouvoirs, procédures d’appel et droit de retrait (pour les membres d’un collectif co-élaboratif souhaitant mettre fin à leur participation). Il importe encore de relier délibération et prise de décision, afin que chacun soit réellement partie prenante de celle-ci. La gestion endo-contributive doit avoir pour principe la recherche de l’inclusion et non celle de l’exclusion. Enfin, l’auto-organisation ne dispense pas d’avoir un projet commun positif : on se rassemble et on co-élabore pour construire quelque chose. Mais ce dernier critère, essentiel, se retrouve aussi dans le mode de gestion exo-distributif. Il est d’ailleurs tout à fait possible que la société de demain mêle les deux modes de gestion, l’exo-distributif centralisé continuant à exister, de manière amenuisée, en lien avec des collectifs endo-contributifs croissants.

Conclusion

Les risques listés plus haut condamnent-ils le modèle endo-contributif à la récupération et au dévoiement ? Pas forcément. Certes, l’endo-contributivité ne va pas de soi et n’est pas à l’abri de détournements. Mais elle pourrait être la solution appelée par notre époque à la triple crise écologique, économique et politique. Un indice, qui est aussi une note d’espoir, est la prise de conscience de l’importance du lien, qui paraît se produire en même temps dans les différentes disciplines des sciences de la nature et des sciences sociales, ainsi qu’en politique. Encore cet espoir doit-il s’accompagner de lucidité.

Le modèle endo-contributif semble émerger dans des formes très diverses et dans tous les domaines. Il apparaît comme inscrit dans une révolution épistémique qui concerne toutes nos théories, c’est-à-dire nos manières de percevoir. Il nous fait passer d’une vision des systèmes sociaux et techniques où le lieu, le statut, le rang surdéterminent les liens, à une conception où la densité des liens (alliances, relations) constitue de façon éphémère les lieux, statuts et rangs. Souple et attentif à son environnement, le modèle endo-contributif est davantage que le modèle exo-distributif en mesure de s’adapter aux événements imprévus, en modifiant ses procédures de discussion et de prise de décision, ainsi que ses dispositifs techniques.

Il est possible, mais pas certain, que nos sociétés parviennent à devenir (davantage) endo-contributives. Par contre, ce qui est probable, c’est que le mode de gestion exo-distributif, qui reste encore majoritaire, soit insuffisant pour relever les défis de la triple crise écologique, économique et politique. Pour cela, nous avons besoin d’une société qui soit effectivement productrice d’intelligence et de sens collectifs.

Bibliographie

Castells Manuel, 1998 (1996), L’ère de l’information. 1. La société en réseaux, trad. Philippe Delamare, Fayard, Paris.

Digard Jean-Pierre, 2018, L’animalisme est un anti-humanisme, CNRS Éditions, Paris.

da Empoli Giuliano, 2019, Les ingénieurs du chaos, Jean-Claude Lattès, Paris.

Foucault Michel, 1998 (1966), Les mots et les choses, Gallimard, « Bibliothèque des sciences humaines », Paris.

Giorgini Pierre, 2020, L’onde et le corpuscule, à paraître.

Lafontaine Céline, 2004, L’empire cybernétique, Seuil, Paris.

Le Bot Jean-Michel, 2010, Le lien social et la personne, Presses Universitaires de Rennes, « Le sens social », Rennes.

Lodé Thierry, 2014, Manifeste pour une écologie évolutive, Odile Jacob, Paris.

Lovelock James, 1999 (1988), La Terre est un être vivant, trad. Paul Couturia, Flammarion, « Champs », Paris.

Minsky Marvin, 1988 (1986), La société de l’esprit, trad. Jacqueline Henry, InterEditions, Paris.

Ober Josiah, 2017 (2015), L’énigme grecque, trad. Philippe Pignarre, La Découverte, Paris.

Ornithomedia, 3 novembre 2010, « Les vols d’étourneaux fonctionnent comme des systèmes critiques », Rhuthmos, http://rhuthmos.eu/spip.php?article199

Paugam Serge, 2018 (2008), Le lien social, Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? », Paris.

Stengers Isabelle et Ralet Olivier, 1991, Drogues. Le défi hollandais, Les empêcheurs de penser en rond, Paris.

Wohlleben Peter, 2017 (2015), La vie secrète des arbres, trad. Corinne Tresca, Les Arènes, « Environnement », Paris.

NOTES

[1Parlante, l’analogie montre aussi rapidement ses limites : la peinture impressionniste juxtapose spatialement des particules de couleurs, tandis que les cordes ne sont pas à proprement parler de la matière dans un espace.