Le Grenelle de l’environnement, 2 mois après : conclusions et perspectives

Après un compte rendu exhaustif des conclusions des groupes de travail du « Grenelle de l’environnement », Fabrice Flipo en propose une analyse qui en restitue toutes les ambiguïtés, notamment sur la place des ONG, avant de conclure sur l’état de l’écologie politique en France.

Le Grenelle de l’environnement, dont la genèse complexe doit autant à l’actualité, aux associations qu’à Nicolas Hulot, et dont on trouvera la genèse ailleurs [1], a constitué un exercice sans précédent et a fait l’actualité de notre pays jusqu’en octobre. Depuis, il réapparaît sous la forme de mesures sporadiques ou de dénonciations. S’est-il arrêté ? Qu’en est-il sorti ? Quelles conclusions pouvons-nous tirer au regard de progrès possibles pour notre société, et pour la planète ?

Analyse des propositions des groupes de travail

Les documents clé pour les 5 ans à venir [2]sont les rapports des tables-rondes finales [3]
(900 pages au total) et le discours final du président Sarkozy. Un rapide tour d’horizon du contenu des rapports est indispensable pour savoir si le dispositif inédit en 5 collèges [4]a fait bouger les lignes.

Energie et changements climatiques

Dans le GT1, un accord s’est dégagé autour du « Facteur 4 » [5]et « 3 x 20 » décidé par le Conseil européen lors de sa réunion les 8 et 9 mars 2007 [6]. Tous les collèges s’accordent sur la nécessité de diversifier les sources d’énergie. Le débat porte sur la contribution de chacune des sources, et sur la politique globale d’efficacité énergétique. Le bâtiment a été identifié comme étant l’une des sources de réduction majeure des gaz à effet de serre. Les techniques sont disponibles, il ne manque que les incitations et les réseaux nécessaires pour les mettre en œuvre à grande échelle. La réduction des consommations dans le bâtiment, neuf et ancien, fait l’unanimité. N. Sarkozy, en clôture, fixera un objectif de 2012 pour que les bâtiments basse consommation deviennent la norme dans le neuf et 2020 pour les bâtiments à énergie positive, assorti d’un objectif de rénovation de 400 000 logements / an. Le transport en revanche est reconnu comme un point dur. Aucune technique n’offre de solution permettant une réduction massive de la dépendance énergétique et des émissions carbonées. L’accord est large concernant la réduction de vitesse des véhicules particuliers, mais peu cherchent à affronter ouvertement les particuliers dans leur usage de l’automobile, le consensus n’étant pas assez fort dans l’opinion publique [7]. Le transport professionnel étant un élément majeur d’efficacité des entreprises, le compromis se tourne vers les solutions multimodales, avec substitution du rail et de la mer à la route quand cela est possible. Le discours final de N. Sarkozy affirmera la nécessité de donner toute sa place aux modes de transport non-routiers, sans toutefois préciser si la route devait diminuer ou non dans l’absolu – et le point est d’importance. Un autre point important est l’intransigeance gouvernementale sur la question du nucléaire.

Les participants du GT1 se connaissent déjà très bien, à la différence des autres GT. La crise énergétique et climatique s’est installée dans le paysage politique depuis plusieurs années. Chaque acteur a produit son scénario pour les prochaines décennies. Le rapport du GT relève donc des désaccords classiques sur les solutions et leur timing, dépendant de la hiérarchisation des risques et des intérêts propres à chaque acteur. Les ONG sont favorables à un développement massif du renouvelable, une réduction des consommations (sobriété) et une amélioration de l’efficacité énergétique. Elles aspirent à une réduction absolue des consommations, mais elles ne l’ont jamais affirmé explicitement. La majorité des contributeurs estime qu’il faut viser 25% de renouvelables, le MEDEF et la CGT s’accordant dans une défiance sur le potentiel de ces énergies et une confiance dans le nucléaire – point qui a le soutien indéfectible de Nicolas Sarkozy depuis le début. L’accord sur la nécessité de modifier la fiscalité afin de la rendre plus vertueuse pour le climat et l’épuisement des ressources se défait sur l’objet de la taxation (énergie ou CO2 ?), sur son point d’application et sur l’affectation de ses recettes (plans climat-énergie ? ménages en difficulté énergétique ?). Des désaccords profonds émergent sur les biocarburants, qui ont la faveur des semenciers vendeurs d’OGM et ont déjà commencé à provoquer la flambée des prix alimentaires. Le solaire fait l’unanimité, car il n’entraîne aucun conflit d’usage et génère du commerce supplémentaire. Ceci se traduit bien sûr en désaccords sur les priorités de recherche.

Pour autant, il y a eu des faits nouveaux. Comme dans d’autres GT, les participants ont apprécié la confrontation avec des adversaires qu’ils ne connaissaient souvent qu’au travers de filtres divers, autorisant tous les fantasmes – « khmers verts » d’un côté, ignorants inconscients assoiffés de profit de l’autre. De plus nul n’envisage plus avec sérénité une planète avec 4°C de plus. Protéger la stabilité climatique apparaît comme un enjeu d’action, d’investissement, et non plus comme une contrainte « gratuite », humanitaire, ce qui eût été inimaginable voici 5 ans. Bien sûr les participants sont familiers du sujet, mais leur accord éclate ainsi au grand jour. Les Claude Allègre en sont pour leurs frais. Les acteurs se divisent sur les stratégies pour atteindre l’objectif consensuel de « protéger l’environnement ». Prenons l’exemple de la rénovation pose problème : qui va payer ? Quels sont les marchés qui seront avantagés par les normes et les réglementations assurant un débouché aux bâtiments « économes » ? Les grandes industries cherchent à placer leurs produits, comme le bâtiment « à énergie positive », mais ils ne sont pas toujours les plus écologiques, loin de là, et les petites entreprises aimeraient avoir leur part du gâteau. Environnement, économie et social apparaissent inextricablement liés. La tension entre environnement et développement durable, ou entre les différentes conceptions du développement durable, est palpable [8]. Le rapport dégage un accord autour de la nécessité de mobiliser la société. Il parle de « rupture » et de « changement de modèle de développement », sans vraiment spécifier ce qu’il entend par là. L’accord sur les enjeux écologiques cache le malaise de ne pas disposer ici et maintenant de technologie permettant de les résoudre de manière massive. C’est déjà en soi une défaite pour les partisans du « tout-technologique », qui sont, dans le domaine énergie-climat, les plus nombreux, y compris du côté des ONG. Une association comme NégaWatt par exemple, en dépit d’un solide engagement rhétorique en faveur de la sobriété, ne propose pas de solution dans ce domaine. Son scénario est principalement technique, tout comme le scénario du Réseau Sortir du Nucléaire, publié peu après la fin du Grenelle [9]. Ces scénarios ont le mérite de dessiner des possibles, mais ils ne sont pas pour autant automatiquement désirables. Ils ne le sont qu’à partir du moment où l’on souscrit aux priorités sous-jacentes, à savoir, dans le cas de l’exemple de NégaWatt, une stabilisation des besoins au niveau actuel ou légèrement supérieur. Or telle n’est pas l’orientation générale des réformes menées par N. Sarkozy.

En date d’aujourd’hui, les mesures concrètes qui sont en bonne voie sont l’écopastille et la rénovation des bâtiments. L’écopastille est certes une mesure de faible ampleur mais elle met le gouvernement dans la position inédite qui consiste à prendre dans la poche des propriétaires de grosses voitures pour mettre dans celle des propriétaires des petites. Les voitures de rêve sont pénalisées, et même la voiture en général est touchée, ce qui est sans doute plus important sur le plan symbolique [10]. La rénovation des bâtiments fait consensus mais bute sur de nombreux obstacles tels que le financement, le manque de compétences ou l’hétérogénéité du parc. L’écotaxe fait l’objet d’intenses travaux de tous les côtés, dans un contexte économique tendu, et n’a pas, pour le moment, abouti à des propositions précises de la part des collèges. Les ONG cherchent à s’allier avec les syndicats, l’écotaxe posant des problèmes d’inégalités sociales, sans pour autant trop pénaliser les entreprises qui souhaitent s’investir dans les produits « verts », cette notion restant opportunément dans le flou, afin de réorienter la production pour offrir aux consommateurs des alternatives réelles et concrètes pour la satisfaction de leurs besoins.

Biodiversité et ressources naturelles

Le rapport du GT2 annonce 119 mesures. La clé de voûte est la constitution d’une « trame verte » (et bleue, pour les milieux aquatiques) nationale c’est-à-dire le réseau des écosystèmes et des espèces non-humaines sur tout le territoire, afin d’arrêter l’érosion de la diversité biologique d’ici 2010 [11]. Ceci implique toute une série de mesures bien connues : réduction drastique de la pollution des eaux et de toutes les pollutions diffuses, protection des ressources halieutiques, révolution doublement verte dans l’agriculture et dans les formations agricoles, protection des patrimoines les plus remarquables. Ce groupe propose plusieurs mesures relevant des Affaires Etrangères : pousser à la création d’une organisation des Nations-Unies de l’Environnement (ONUE), faire prendre en compte les critères écologiques à l’OMC, favoriser les bois locaux, les bois importés devant être certifiés. Il propose aussi plusieurs mesures de gouvernance nouvelles : regrouper les compétences en matière de biodiversité dans une seule entité, développer les sciences de l’écologie, faire apparaître la consommation de surfaces dans la dotation des collectivités territoriales, établir une écotaxe indexée sur la consommation d’espaces et de ressources naturelles et affecter ses recettes à un allègement travail et capital [12]. Les désaccords portent principalement sur la question agricole. La FNSEA a fait des concessions, mais le Ministère de l’Agriculture bloque les avancées.

Au jour d’aujourd’hui, les discussions semblent être au point mort. Les associations ont obtenu une contre-expertise sur un projet en Guyane, guère plus. Le reste ressemble à une mise en cohérence des dispositifs existants, qui se trouvent donc renforcés, sans toutefois être de nature, d’après les associations, à atteindre l’objectif d’arrêt du déclin de la diversité biologique sauvage. Les maigres avancées dans le domaine agricole ne permettent pas d’être plus optimistes sur le cas de la biodiversité domestique. Nicolas Sarkozy en a par contre profité, lors de son discours en Camargue, pour flatter l’écologie de droite, avec une rhétorique proche de celle du CPNT [13]- terroir et traditions françaises... Gageons qu’il ne s’agit là que de l’un des innombrables discours de circonstances du président, qui ne semble en aucun cas décidé à sacrifier la croissance à l’écologie.

Santé-environnement

Le GT3 est très conflictuel. Le rapport de l’Académie de Médecine et la controverse qui s’en est suivie [14]a donné le ton. C’est l’existence même d’un problème significatif qui est en cause. Devant la difficulté à établir ce qui fait problème de manière collective, la question de l’expertise revient sans cesse sur le tapis. Les parties s’accordent finalement sur la nécessité de créer un Haut Conseil de l’Expertise afin de garantir la transparence, la déontologie et les méthodologies de l’expertise. Le GT s’accorde aussi sur la nécessité de mieux former les médecins et les chercheurs aux disciplines de l’environnement. L’Académie de médecine ne dispose pas des disciplines mobilisées par les associations. Le désaccord sur la nature du problème impacte les priorités de recherche. Pour les uns, l’urgence est à l’étude de l’environnement, tandis que pour les autres l’urgence est à la réduction des substances manifestement nuisibles. Tous s’accordent toutefois pour renforcer la surveillance environnementale et sanitaire. La sensibilité à la pollution étant dépendante de l’âge, du sexe, de l’exposition etc., tous s’accordent pour demander un Plan Santé Environnement 2 (PNSE2) qui prenne en compte cet aspect. Les nanotechnologies et les ondes électro-magnétiques sont retenues comme devant faire l’objet d’études plus poussées.

Mais le problème de fond est la confiance généralement affichée par l’Académie dans les progrès apportés par la science et l’industrie. La question de fond est, comme dans le cas des OGM, celle du progrès : à quoi bon encadrer l’usage d’innovations « phytosanitaires » [15]quand on sait que les acteurs mobilisés sont structurellement incapables de répondre aux problèmes posés ? Aucune amélioration des pesticides ne leur ôtera leur caractère nocif pour le vivant, puisqu’ils sont fabriqués dans ce but. Ce qui n’est pas dit, toutefois, est que la suppression pure et simple des pesticides aurait pour conséquence de changer complètement les pratiques culturales, et de ce fait l’ensemble des bénéfices, en particulier pécuniers, tirés du système actuel, en particulier par les grandes entreprises. De ce désaccord non explicité sur l’orientation du progrès découle des désaccords sur l’identité des « pollueurs », des responsables, des personnes et des organisations qui devraient changer pour que la situation s’améliore. Les employeurs affirment que les mesures existantes (REACH, convention de Stockholm etc.) sont largement suffisantes, il n’y a pas lieu de bannir de nouvelles substances, ce qui ne ferait que déplacer les problèmes. Les ONG cherchent au contraire à faire passer des substituts, et plus timidement à mettre en cause la fuite en avant capitaliste [16]. La question de la responsabilité juridique est abordée mais aucune proposition n’est faite dans ce domaine. Reste à savoir si cette substitution est possible, et si elle ne va pas déplacer le problème. Les discussions sont très techniques.

Modes de production et de consommation (pêche, alimentation etc.)

Le GT4 a été conflictuel dès la délimitation de son champ d’action, portant initialement sur l’agriculture. Les réunions préparatoires ont été ponctuées de menaces de sortie du processus de la part des ONG ou de la FNSEA. Le rapport se veut consensuel : tout le monde s’accorde sur un objectif de 100% d’agriculture durable à long terme. Reste à savoir ce que cela signifie. Le rapport présente comme consensuelle une approche de certification (« haute qualité environnementale », devenu par la suite « haute valeur environnementale »), pour la pêche comme pour l’agriculture, mais elle a été immédiatement contestée par les ONG. Faute de précisions quant à ce que cela signifie, il est ensuite facile de viser 50% d’exploitations certifiées « durables » d’ici 2012. La proposition d’atteindre 6% de la SAU [17]en bio d’ici 2010 et 20% d’ici 2020 est plus concrète, de même que l’objectif de 20% de bio dans la restauration collective d’ici 2012. Reste qu’à ce jour rien n’a été fait pour mettre en œuvre cet engagement. Le rapport reconnaît toutefois la nécessité d’une évolution d’ensemble des exploitations pour réduire les pollutions et les impacts sur l’eau, ce qui avait été reconnu pour la première fois par l’INRA lors d’un colloque sur les pesticides en 2005 [18]. Le monde agricole n’ignore pas ces enjeux mais il estime souvent qu’il y a plus pollueur que lui, et que les conséquences d’une agriculture totalement « propre », selon les critères des ONG, sont largement occultées par ces dernières. Et en effet il est difficile de trouver des associations répondant précisément à leurs arguments. On pourra rétorquer qu’elles ne sont pas des partis politiques et n’ont donc pas de vision globale à avoir. Il n’empêche que cela contribue à maintenir le débat dans le domaine technique, à nouveau, ce qui limite forcément les marges de manœuvre.

L’accord sur la réduction des pollutions et des intrants cache à nouveau un désaccord sur les moyens pour y parvenir. Les syndicats soulignent l’importance des mesures de transition, les agriculteurs étant largement dépendants, pour l’équilibre financier de leurs exploitations, de ces intrants. Le désaccord sur les biocarburants persiste. La FNSEA les défend car ils permettent de faire remonter les prix des produits agricoles et offrent de nouveaux débouchés. Le MEDEF y voit une contribution à la solution du problème énergétique et climatique, mais les défend de manière étonnamment modérée. Est-ce la foi dans le nucléaire et l’exploration fossile ? Les ONG pointent la concurrence entre les usages des sols, le risque (avéré) de flambée des prix qui conduirait à « nourrir les voitures plutôt que les personnes ». A nouveau, la recherche est interpellée, malheureusement pas dans des termes favorables au bio. La formation est aussi mise à contribution. L’environnement doit être un facteur intégré dans les lycées et les formations professionnelles. La distribution est interpellée puisque le rapport insiste sur la nécessité de développer les circuits courts, évitant ainsi des déplacements (et des émissions de gaz à effet de serre).

En conclusion du rapport, le président du GT2 regrette que le groupe n’ait pas étendu ses discussions à d’autres produits que l’alimentation et l’agriculture, car les lessives sont aussi à l’origine de pollution par les phosphates. Le président note aussi que « la conception de l’innovation a changé : il ne s’agit plus de percées scientifiques nouvelles qui diffusent par le biais des instituts techniques dans le tissu économique ; maintenant, tous les acteurs doivent participer à la définition et au pilotage de programmes globaux ». Mais s’agit-il d’inclure les ONG parmi des acteurs du « macrosystème technique » [19]existant, afin de l’optimiser sans en changer les prémisses, ou s’agit-il de promouvoir d’autres macrosystèmes techniques, d’autres trajectoires techniques ? Les ONG quant à elles jugent scandaleux de ne pas avoir mentionné la question de la Politique Agricole Commune (PAC) dans le rapport, et la position de la France à son égard, alors que celle-ci structure la majeure partie de l’agriculture nationale, et européenne.

Les premières mesures concrètes issues de ce GT touchent les OGM, question abordée dans un « intergroupe » spécifique (voir plus bas).

Gouvernance de l’environnement

Le rapport du GT5 propose 4 axes structurants. Le premier est la reconnaissance des associations comme « partenaires » dans la prise de décision. Mais la présence des associations pose la question des critères de leur représentativité. Rien n’est dit dans le détail sur la forme que cette reconnaissance pourrait prendre, ni sur les critères de représentativité. Or cet enjeu sera déterminant sur la capacité – ou non – des associations à peser suffisamment et à faire front ensemble. L’exercice du Grenelle a déjà exacerbé les tensions existantes entre les associations, FNE accusant les autres associations de manière à peine voilée de ne pas être représentatives. Et en effet engager les Français dans des changements importants demandera un peu plus que des convictions militantes, de la dénonciation et des actions médiatiques, nous y reviendrons.

Le second axe structurant est d’intégrer l’environnement dans les instances existantes. Il a été proposé de créer des commissions parlementaires ad hoc, de rendre le Parlement responsable de la Stratégie Nationale de Développement Durable, renforcer ou supprimer le CNDD [20]etc. Les instances « développement durable » se sont en effet multipliées ces dernières années, sans créer la rupture recherchée. Le GT5 n’a pas trouvé de proposition consensuelle sur ce sujet, hormis la réforme du Conseil Economiques et Social (CES), repris par Sarkozy dans son discours de clôture. Le président ira même jusqu’à préconiser que la décision à 5 collèges se substitue aux décisions administratives en ce qui concerne les grands projets – ce qui nous renvoie au point précédent : qui représente « l’environnement » ?

Le troisième axe a trait à la démocratie participative, l’un des grands principes issus du Sommet de Rio en 1992. Les décisions publiques doivent être davantage construites dans la transparence, fondées sur la concertation et la participation, impliquant l’accès à l’information, l’évaluation et l’expertise pluraliste, et suivies d’une application effective – ce que Nicolas Sarkozy assortira de multiples exceptions (secret défense etc.) qui peuvent limiter l’exercice de ces droits... à ce qu’ils sont aujourd’hui, voire encore moins. A nouveau l’un des points en débat est la constitution de l’expertise. Les ONG demandent un statut pour protéger les « lanceurs d’alerte » [21]. Ce point est soutenu par les syndicats, qui souhaitent l’utiliser dans les entreprises. Il est fortement contesté du point de vue employeur, qui souhaitent en rester à des chartes de déontologie. N. Sarkozy n’y fera même pas référence. Le seul point réellement constructif ici est l’affirmation de la nécessité d’un Etat exemplaire. Ce n’est pas nouveau, attendons de voir comment cela se traduit avant de parler de « rupture ».

Le quatrième axe porte sur l’intégration de l’environnement et du développement durable dans la gouvernance des entreprises en tant « qu’opportunités stratégiques et sources de création de valeur durable ». Ici est rappelé la nécessité de l’implication des dirigeants, la responsabilisation des conseils d’administration et instances de direction, l’instauration d’un dialogue ouvert avec les parties prenantes externes, un élargissement des missions des institutions représentatives du personnel et un renouvellement des thèmes de la négociation collective de branches et d’entreprise ; et des dispositions adaptées aux types et à la taille des entreprises. Les points en débat portent sur une éventuelle modification de la loi NRE [22], la responsabilité des bailleurs de fonds et l’information des sous-traitants. Employeurs et syndicats ne souhaitent pas voir entrer les ONG dans les entreprises. Par ailleurs, trois dimensions transversales, qui concernent l’ensemble des groupes du Grenelle, ont émergé : l’éducation à l’environnement, la recherche et l’innovation, la dimension internationale.

Compétitivité et emploi

Le GT6 a surtout repris des éléments présents dans d’autres GT. La synthèse du Président du GT affirme deux convictions et trois principes qu’il est utile de mentionner pour l’analyse. Deux convictions : d’une part qu’environnement et développement sont intégrables, et d’autre part que la « montée en gamme » environnementale des produits et services est rapide et irréversible. Et trois principes : les nouveaux modes de production ne sont pas seulement des « écotechnologies » mais concerne l’ensemble de l’économie ; la protection de l’environnement doit s’accompagner de formation et d’éducation ; les instruments économiques incitatifs (taxes ou permis) doivent être mobilisés pour rapprocher le prix des produits de leur « prix écologique », réduire les coûts de transaction et inciter les entreprises à innover. Le rapport insiste pour les conditions du « verdissement » ne réduisent pas la compétitivité (d’où l’idée par exemple d’un mécanisme d’ajustement à la frontière), qu’il y ait une évaluation des conséquences redistributives des mesures, que les ménages puissent trouver de vraies possibilités de choix écologiques, y compris sur le plan de l’accessibilité financière, et prendre en compte la dimension européenne. Il reconnaît aussi prendre conscience que les instruments économiques ne suffiront pas et que nous devrons jouer sur les infrastructures et la recherche.

Le rapport propose deux grands types de mesures. Les premières portent sur la qualité de l’information : aller vers une corégulation du BVP
 [23], élaborer et diffuser des indicateurs de développement durable (IDH, empreinte écologique etc.), sensibiliser aux enjeux de l’environnement, informer les citoyens et les consommateurs sur le cycle de vie des produits qu’ils achètent. Ce point reconnait que l’information sur l’environnement manque largement. A l’heure de la « société de l’information », cela aurait pu poser d’autres questions ! Les citoyens sont surinformés : ils reçoivent des milliers de messages publicitaires par jour, par exemple. Comment se fait-il que les informations sur l’état de l’environnement, qui existent bel et bien, ne leur parviennent pas ? Là encore les ONG ont fortement limité leurs demandes. Elles auraient voulu une réduction drastique de la surface autorisée pour la publicité, par exemple. La question de la dépendance des médias envers la publicité n’a pas été soulevée, dans un monde où le payeur est couramment considéré comme le donneur d’ordre. Il y a lieu de croire que les ONG n’ont pas été assez loin dans leurs revendications, et cela principalement du fait de leur manque d’expertise économique.

La seconde catégorie d’action porte justement sur les régulations économiques. Outre quelques considérations générales sans conséquences immédiates, ce volet comprend tout de même plusieurs mesures qui pourraient devenir d’authentiques acquis du Grenelle. L’écopastille, tout d’abord, que nous avons déjà évoquée, et qui pourrait provoquer un changement significatif si elle était annualisée. Les conducteurs touchés par le malus auraient à payer chaque année un montant de l’ordre de celui de leur prime d’assurance, ce n’est pas rien. On est dans la transition, mais aussi dans le consumérisme. Une réforme plus structurelle est la proposition de revoir à la hausse les valeurs des externalités dans les calculs socioéconomiques, en particulier ceux des collectivités territoriales. Une valeur importante donnée à la tonne de déchets toxiques ou de CO2 pourrait modifier les arbitrages économiques des territoires – si cela se produit. Cela témoignerait d’une prise au sérieux des indicateurs environnementaux – car tel est bien l’enjeu : informer oui (PIB vert etc.), mais cela ne sert à rien si les arbitrages ne sont pas modifiés. L’autre mesure poids-lourd du Grenelle pourrait être la « contribution énergie-climat ». Ici à nouveau employeurs et syndicats s’accordent sur une contribution carbone alors que les ONG souhaitent une contribution énergie, qui pénaliserait aussi le nucléaire, ses risques majeurs et ses déchets toxiques. Tous souhaitent stimuler la recherche, le développement et la diffusion des technologies favorables à l’environnement mais divergent sur la définition d’une technique « favorable à l’environnement ». Les ONG ont essayé d’introduire un critère d’éco-conditionnalité sur la recherche, qui a été refusé par les employeurs. Le GT fait aussi état d’un consensus pour analyser les conséquences socio-économiques des politiques environnementales, pour pousser l’achat public éco-responsable, promouvoir une économie circulaire et l’économie de fonctionnalité (promouvoir les analyses de flux de matière, écoconception), ainsi que la sensibilisation et la formation au développement durable. Plus que jamais, environnement et développement durable sont inextricablement liés.

Les deux intergroupes, OGM et déchets

L’accord sur le droit de produire et de consommer avec ou sans OGM bute sur la question des seuils, qui sont pourtant déterminants pour le droit de produire et consommer sans OGM. Pour les ONG, la coexistence est impossible, par conséquent la recherche doit être confinée, ce qui conduit à un moratoire sur les OGM en plein champ. Les experts industriels soutiennent l’inverse depuis des années. Aussi le fait majeur ici est que les cas de contamination rapportés par les uns n’ont pas été contestés par les autres. Implicitement, la Commission du Génie Biomoléculaire est désavouée, de même que l’Académie des Sciences, du fait de l’absence des sciences pertinentes (écologie, écotoxicologie etc.) en leur sein. Le problème de l’assurabilité des cultures OGM est pointé du doigt, sans solution qui fasse consensus. Le MEDEF n’a pas fait de proposition officielle sur le sujet, la FNSEA était assez isolée. La phase de travail dans les comités opérationnels a toutefois démontré que l’administration de l’Etat, y compris dans sa composante scientifique, soutenait largement la conception productiviste de l’agriculture. Le fait que Christian Vélot, chercheur en biologie génétique, soit inquiété par sa hiérarchie en raison de ses prises de position critiques sur les PGM, tandis que d’autres, soutenant la recherche en plein champ, ne le sont pas. Le président pourrait toutefois arbitrer en faveur d’une suspension des OGM, car la « bulle génétique » semble en passe de se dégonfler, tout comme la bulle Internet avant elle. Après plus de 2O années de recherche, la génétique n’a que peu de victoires éclatantes à afficher à son palmarès, ce qui autorise les associations à douter du bien-fondé des arbitrages financiers qui sont rendus systématiquement en sa faveur et en défaveur de l’écotoxicologie, l’agronomie etc.
En juin, du fait de son engagement de ne rien faire de contraire à l’environnement avant la fin du Grenelle, le gouvernement avait accédé à la demande des ONG de suspendre le MON810. A ce jour il a été suspendu jusqu’à l’adoption d’une loi, qui devrait être élaborée en janvier. Les ONG ont rétorqué que cela n’engageait à rien à court terme puisque les semis n’ont lieu qu’au printemps. Tout dépend donc de la loi. Le comité opérationnel travaille en ce moment sur un projet de Haute Autorité sur les OGM, dont l’émergence est très houleuse. Les autorités françaises et européennes sur les OGM sont fortement contestées par les associations depuis longtemps, étant jugées aux mains des semenciers et producteurs d’OGM, et opérant de manière opaque, sous couvert du secret commercial. L’avenir dira si cette nouvelle autorité est plus ouverte que les autres, et quel seront ses compétences. Les ONG se retrouvent prises au piège dans une stratégie défensive, puisque la « Haute Autorité » pourra au mieux protéger les filières bio en repoussant les OGM.

Le rapport de l’intergroupe sur les déchets a repris et renforcé des objectifs prioritaires bien connus et déjà inscrits dans les lois existantes : réduction de la production de déchets (responsabilité élargie du producteur, écoconception, durée de vie, tarification incitative etc.), développer le recyclage (BTP, déchets organiques), diminuer le volume stocké ou incinéré et informer les citoyens. Un consensus s’est exprimé autour d’un besoin de recherche sur les traitements, ce qui montre le manque de connaissances dans ce domaine. Le débat a porté sur l’incinération, la dangerosité des toxiques à faible dose et l’effet global des incitations positives ou néfastes que rencontrent les différents acteurs. Les ONG ont par exemple demandé à modifier la gouvernance des éco-organismes, sans succès. Le comité opérationnel sur les déchets est celui qui a abouti le plus rapidement. Le 20 décembre, il rendait ses conclusions finales. Elles reprennent une partie des revendications des associations : priorité au recyclage, accroissement du principe de « responsabilité élargie des producteurs » (REP), taxation incitative, supprimer les clauses de tonnage pour les incinérateurs, qui incitaient à produire du déchet pour alimenter la machine… Des engagements qui sont analysés plutôt comme une victoire par les associations, les incitant ainsi à rester impliquées dans les autres comités. La foi des associations dans la REP laisse toutefois quelques doutes les progrès accomplis.

Un processus sortant des catégories classiques mais sans rupture sur le fond

Le calendrier politique était très favorable à la tenue d’un événement exceptionnel sur les questions environnementales. Cet enjeu est enfin réapparu sur l’agenda, après une disparition de plus de 20 années, suite au contre-choc pétrolier. Le film d’Al Gore, les travaux du GIEC, les événements à tort ou à raison attribués aux changements climatiques, les nombreux articles et ouvrages autour de la crise de l’énergie (pic de pétrole) ont considérablement accéléré la mise en politique des enjeux écologiques.

Lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy a été très mal noté par l’Alliance pour la Planète. Son 8 sur 20 était comme une épine dans le pied. Il était bien difficile de l’imaginer à l’initiative d’un événement susceptible de donner de l’importance aux enjeux écologiques. Et pourtant. Le nouveau président fait des promesses, crée le super-ministère voulu par les écologistes, est à l’initiative d’un événement sans précédent sur l’écologie en France. Son discours final est salué par la plupart des observateurs, français et étrangers, associatifs, patronaux et syndicaux. Le nouveau président a-t-il trouvé la recette miracle du « développement durable », conciliant les trois piliers, économie, social et écologie ? N’était-ce pas plutôt une opération de communication ? Ou quelque chose d’autre encore ?

Les résultats connus à ce jour donnent une idée de la stratégie adoptée. Le discours de N. Sarkozy brille par sa force et son volontarisme… mais aussi par son incohérence. Le président prononce les mots que chaque partie veut entendre et laisse à ses auditeurs le soin de faire le tri. Ainsi le « droit à la transparence totale » est-il affublé de multiples limites que chacun comprendra comme il veut. Les pesticides seront réduits « dans la mesure du possible » etc.

Les critiques n’auront retenu que le manque d’engagements. Ils auront même accusé les ONG de trahison. Ce n’est pas faux. Les associations écologistes sont encore faibles. Elles ont dû rogner leurs revendications et le manque de rupture des conclusions finales doit aussi au réalisme de leurs propositions. L’un des enjeux à venir est la recomposition des acteurs portant les questions écologiques, car, si l’environnement est consubstantiel au développement durable, alors il n’y a nulle raison pour que ces questions restent le monopole de ces organisations, bien au contraire. Il continuera de leur appartenir d’alerter sur l’état des milieux mais les arbitrages appartiennent à tous.

Néanmoins le Grenelle a permis d’avancer sur certains dossiers. Laisser à ses auditeurs le soin d’avancer par eux-mêmes a été plutôt fructueux, en termes de mobilisation sociale. Il convient donc de reconnaître l’originalité du dispositif. Bien sûr, nous ne sommes pas dans la même situation que le premier Grenelle. Le pays n’est pas bloqué, les millions de manifestants ne sont pas dans les rues etc. Néanmoins l’écologie est un souci grandissant chez nos concitoyens. Le Grenelle a d’ailleurs suscité une mobilisation énorme – des centaines voire des milliers de participants et autant de propositions. Il a fait bouger les lignes. Après s’être regardés en chiens de faïence, les acteurs reconnaissent tous avoir beaucoup profité des échanges, surtout fin août, passé les premiers rounds de heurts puis d’observation. Bien des désaccords persistent, mais il a été mis fin à certains dialogues de sourds et images d’Epinal. La précipitation avec laquelle la concertation a été menée a fait l’objet de nombreuses critiques. Mais cette manière de faire était la condition d’un succès médiatique. L’événement a été très suivi. De nombreux médias ont édité des numéros spéciaux [24]. Le Grenelle peut d’ores et déjà être considéré comme un événement majeur en tant que catalyseur d’éducation populaire en matière d’enjeux écologiques. De nombreux sujets qui étaient encore jusqu’il y a peu des discussions de spécialistes a été mis sur la place publique. Bien sûr, beaucoup reste encore à faire pour relever les défis, mais c’est un progrès indéniable. L’environnement est désormais politisé au sens où les positions de tous les acteurs de la société ou presque doivent désormais être justifiées au regard de « l’impératif écologique ». La précipitation avec laquelle la « négociation » a été menée a créé l’événement et contribué à crédibiliser l’urgence, réelle, de la situation. La question écologique a rarement été aussi présente dans les médias. L’écologie en tant qu’enjeu collectif majeur, « non-partisan », « au-delà des partis », a progressé. A ce titre le Grenelle a permis de continuer l’effort de politisation de l’écologie. C’est là un point largement positif – et qui doit en réalité assez peu à N. Sarkozy, qui a probablement été débordé par l’activisme des différentes parties prenantes. Au moins a-t-il pu améliorer sa formation dans le domaine de l’environnement ! La forme du processus a été largement laissée à l’initiative des acteurs eux-mêmes. Le gouvernement a laissé les acteurs en présence se confronter avant d’en tirer ses propres arbitrages. A aucun moment, il n’a exagérément contrarié les acteurs dans leurs revendications. Ceux qui sont partis, comme le Réseau Sortir du Nucléaire quittant l’Alliance, l’ont fait de leur plein gré. Aucun sujet n’a été tabou, les conditions demandées par les ONG ont assez bien été respectées.

Le revers de la médaille est que les mobilisés étaient celles et ceux qui étaient capables d’être présents dans cet exercice et d’argumenter sans délai sur la question. Les autres sont restés sur le bas-côté. Quel est le bilan de ce court-circuit des canaux traditionnels de construction de l’intérêt général ? Marque-t-il l’échec des Verts et de la voie « politique » traditionnelle ? Ouvre-t-il la voie vers de nouvelles procédures démocratiques ? Le processus a donné la parole à des acteurs faibles, c’est certain. L’expertise des ONG a été reconnue. Mais les représentants des collectivités territoriales, des régions ou des villes, par exemple, ont été plus souvent d’accord avec les ONG et les syndicats qu’avec les employeurs, mais elles étaient représentées par des personnalités connues pour leur engagement écologiste. Il est à craindre, comme ce fut le cas à Rio en 1992, que les décisions prises par les responsables territoriaux de l’environnement ne soient guère suivies d’effet dans l’immédiat… car les décisions contraires des autres « ministères » vont continuer de s’imposer à elles dans le concret des arbitrages futurs. Le point dur, pour les collectivités territoriales, c’est aussi le financement. L’Etat leur a légué des obligations supplémentaires, sans les recettes nécessaires. De plus la compétitivité est un souci qui agite aussi les territoires. La collectivité « durable », tout comme l’Etat durable, ressemblerait pour certains à la Suisse : un territoire « propre » chez lui et compétitif. La stratégie de « dématérialisation des économies » Mais la Suisse a une activité principalement tertiaire… tout en vivant de manière assez industrialisée. Les produits sont bien fabriqués quelque part. L’enjeu est donc de savoir qui va porter les « maux » économiques et écologiques, quand d’autres vont accaparer les « biens ». Cela vaut aussi bien pour la politique étrangère de la France, qui a très peu été abordée, même si bon nombre de problèmes environnementaux traités, étant de nature globale, l’impacteront forcément ultérieurement. De ce point de vue, le rapport Syrota n’est ni un détail ni un accident ; il reflète une opinion bien présente dans les territoires. Les « productivistes » refusent de rompre avec le modèle dominant, ils se contentent de prédire une croissance qui serait progressivement « verdie » par des découvertes scientifiques et technologiques (séquestration de carbone, biocarburants à haut rendement énergétique, hydrogène, adaptation aux changements climatiques etc.).

Reste la question du social. N’importe quelle mesure écologique de grande ampleur la rencontre sur son passage. Des associations comme « 40 millions d’automobilistes » ont raison de pointer le problème du pouvoir d’achat. Cela permet aussi de noter la relative absence des associations de consommateurs. Les ONG et les syndicats se sont toutefois retrouvés plus proches qu’ils ne le pensaient [25]. Les ONG ont mieux compris leurs divergences et les points aveugles sur lesquels elles doivent se positionner plus clairement pour faire des alliances. Dans le Grenelle, les syndicats se redécouvrent dans la proposition et pas seulement la résistance. Cela peut constituer, pour eux, une opportunité de renouvellement. Le gouvernement, pour sa part, a surpris. Des mesures comme le « bonus / malus » comportent un authentique volet redistributif, des riches vers les pauvres – et pas seulement des familles (possédant de grandes voitures) vers les personnes seules (possédant les petites). N. Sarkozy a bien mené une politique au-delà des clivages gauche / droite, pour la plus grande partie de la population. Mais les très riches, eux, ne sont pas inquiétés. Ce qui ressort donc est la finesse du jeu politique du président qui, sous des airs volontaires et désinvoltes, élabore des discours qui sont habilement calculés pour éviter de cristalliser une opposition susceptible de freiner ce qu’il présente comme ses avancées. N. Sarkozy, en sortant des discours tout faits, idéologiques, de politique politicienne, dans laquelle s’enferment ses opposants, procède donc bien par la rupture. Sur le fond, par contre, les hiérarchies de droite - modérée - sont respectées. Le discours du président en Camargue l’a mieux explicité : il s’agit de s’ancrer dans une écologie de droite, « terroirs », plutôt hostile à l’étranger, considérant les enjeux écologiques comme des enjeux de puissance. A ce titre-là, la politique de N. Sarkozy est simplement « décomplexée », comme dans bien d’autres domaines.

Des ONG en position inconfortable

Un enjeu a constamment sous-tendu l’ensemble des discussions : existe-t-il un « subpolitique » de l’environnement [26], comme il en existe dans le domaine de la recherche, de la médecine etc. ? Peut-on négocier l’environnement comme on négocie les conditions de travail dans une branche ou comme on administre une mutuelle d’assurance-maladie ?

Les ONG et les écologistes historiques affirment depuis longtemps que les enjeux écologiques ne peuvent rester confinés au domaine « subpolitique ». Le Ministère lui-même a plutôt voulu sortir la question écologique du domaine technique en affirmant que « le temps de la refondation est venu. Il s’agit d’une rupture. D’abord avec une vision trop technique de l’écologie car avant d’être un sujet technique, l’écologie est une question de société… » [27]. Et de fait, comme l’ont aussi remarqué Pierre Radanne et Michel Mousel [28], c’est la question du développement durable, et non celle de l’environnement, qui a sous-tendu la plupart des discussions au Grenelle. La définition des périmètres de chaque groupe, qui ne préexistait nulle part, fut d’ailleurs parmi l’un des sujets de débat les plus constants de la préparation du Grenelle. La difficulté est habituelle en matière d’environnement et de développement durable. L’environnement, étant partout, a longtemps été nulle part. La composition en six groupes est finalement entérinée.

Mais les tables-rondes ont d’emblée inscrit le débat dans le domaine subpolitique. N’étant pas animées par des politiques, elles n’avaient pas d’autre choix. Les ONG se sont alors retrouvées dans une position très difficile. En siégeant à une négociation dont elles ont voulu que les enjeux soient politiques tout en voulant rester dans le domaine sub-politique de l’action réaliste de terrain et de l’agitation médiatique, elles se sont limitées elles-mêmes dans leurs revendications. Elles étaient alors dans un rôle inhabituel, celui de la codécision. Et décider c’est faire des compromis. Les ONG sont habituées à défendre des positions de principe dans le débat public, et assurent ainsi une qualité de débat que les médias ne parviennent plus à assurer dans la sérénité. Elles soulèvent les problèmes oubliés, mettent en lumière les acteurs faibles, à tous les niveaux de décision [29]. Elles renforcent la qualité de la démocratie. Jusque-là les ONG pouvaient se permettre d’avancer des solutions très radicales, ne serait-ce que pour ouvrir des possibles dans un débat public plus que sclérosé par l’absence de perspectives. Cela ne posait pas de problème car le grand public avait bien conscience que les ONG ne sont pas en capacité de décision [30]. Tel n’est plus le cas dans le Grenelle. Les ONG se retrouvent sommées de proposer des solutions « réalistes », et perdent donc une grande partie de leur capacité critique. L’Alliance, d’ordinaire plus radicale que d’autres, s’est trouvée très mal à l’aise et a cherché divers prétextes pour sortir. Cependant comme c’est elle qui a demandé la négociation, elle n’aurait pu sortir que si le gouvernement violait l’une des conditions posées par l’Alliance, ce qu’il s’est bien gardé de faire jusqu’ici. L’Alliance s’est donc repliée sur des positions assez timides, qui ne sont peut-être plus à la hauteur des espérances des citoyens. Le risque est grand de voir les ONG considérées comme « vendues », inutiles. Mais comment savoir exactement ? Comment savoir jusqu’où pousser les revendications ? Les associations n’ont pas été capables de démontrer clairement si leurs mesures bénéficiaient d’un soutien populaire. Elles n’ont même pas été clairement capables de savoir si leurs mesures étaient vraiment soutenues. Pour cela, il leur aurait fallu autre chose que des sondages. Dans le Grenelle, les ONG se sont retrouvées à représenter les intérêts d’une partie du peuple français. Mais quelle partie ? Et comment ? Cette question, majeure, a sous-tendu bien des choix stratégiques et des affrontements inter-associatifs. Les ONG de l’Alliance, tout d’abord, ont été prises au dépourvu car elles ne pouvaient inscrire la représentativité des options qu’elles défendent dans aucun référentiel de légitimité existant – ou trop, ce qui devient politiquement illisible. L’Alliance est constituée de près de 80 organisations différentes. Elles ont peu de membres, peu ou pas de groupes locaux, sont généralement spécialisées dans un enjeu à l’exclusion de tous les autres, sont très peu homogènes entre elles etc. Jusqu’à présent, elles bénéficient d’un succès d’estime très important. Les Français leur font largement confiance, comme le montrent les sondages [31]. Mais les Français leur font confiance pour l’information et l’alerte sur les questions environnementales. Difficile d’évaluer le poids politique des solutions qu’elles soutiennent. Les sondages, avec leur incertitude, indiquent plutôt que les Français font confiance dans l’arbitrage de l’Etat [32]. Les ONG se sont donc retrouvées donc face à un très grand risque : celui de la délégitimation, pour cause d’usage illégitime du pouvoir. Pour ne pas trahir, elles doivent adopter des positions représentatives. Mais où les trouver ? Tant qu’elles s’en tiennent à des postures de principe, relativement inattaquables comme la dénonciation des pollutions, des abus etc. alors le travail est facile. Mais quand il s’agit de proposer des solutions, on entre dans le compromis politique et ce qui compte est la représentativité des solutions poussées – que l’on soit démocrate ou pas. Or les ONG n’ont pas de moyen fiable pour connaître la représentativité de leurs solutions, car elles ne disposent pas des procédures adéquates d’agrégation des opinions. Elles ne savent pas si elles doivent faire des demandes radicales ou pas.

Mises sur un terrain qui n’est pas le leur, en mal de repères pour savoir quelles mesures pousser, le jeu tournerait-il à l’avantage de FNE, qui affirme au contraire disposer de ces procédures d’agrégation et d’un travail de cogestion vieux de plusieurs décennies ? FNE a voulu se démarquer, parfois de manière agressive, des autres ONG, cherchant à apparaître comme un partenaire fiable et raisonnable pour la cogestion. FNE a cherché à éviter l’agitation médiatique, à « contrôler ses troupes » afin de démontrer sa représentativité « sur le terrain ». La reconnaissance institutionnelle a été très tôt identifiée par FNE comme l’un des enjeux majeurs du Grenelle. Le 20 septembre FNE publiait un communiqué de presse insistant sur le fait que « L’enjeu est immense : identifier les partenaires environnementaux et définir un nouveau dialogue environnemental entre tous les acteurs publics et privés concernés par l’urgence écologique ». Il est vrai que FNE est la seule association à pouvoir faire état d’un nombre important d’adhérents et d’une implantation locale conséquente, bien plus conséquente que certains partis politiques. FNE est rompue au compromis, étant présente dans de nombreuses commissions locales ou nationales – déchets, CLIS etc. De leur côté, les membres de l’Alliance s’inscrivent davantage dans une démarche de contre-pouvoir. Néanmoins là encore la stratégie est risquée. Le pouvoir gagné lors de la reconnaissance dépend de l’extension que l’on donne à « l’environnement ». Dans les villes, au début, « l’environnement » a d’abord eu en charge la gestion des espaces verts et des crottes de chien... On n’en est plus là, certes, mais FNE n’aura pas non plus l’ensemble du développement durable sous sa coupe ! FNE risque de prendre le pouvoir, certes, mais en le réduisant à sa portion congrue, c’est-à-dire finalement en le perdant. Ce qui aura pour effet principal de renforcer les ONG qui se tiendront en dehors, car elles seront les seules à pouvoir continuer de tenir des propos larges, visionnaires, à la hauteur du problème. Devenue cogestionnaire, FNE ne pourra pas prendre de position « forte » en matière de développement durable sans être en contradiction avec son périmètre de responsabilité. Et si elle prend des positions fortes, alors sa représentativité, qui ne peut démontrer l’adhésion que de 100 à 200 000 personnes, paraîtra elle aussi bien faible - et dans cette hypothèse nous n’entrons pas dans la discussion de la qualité des procédures démocratiques internes à FNE ! FNE risque donc de perdre son indépendance et de servir de caution « écolo » au gouvernement, qui lui sous-traitera la surveillance de milieux qu’il est de toute façon décidé à piétiner.

Que dire de la Fondation Nicolas Hulot là-dedans ?... Elle semble croire qu’on peut résoudre des problèmes politiques de grande ampleur en étant ouverts et sympathiques. La FNH illustre à merveille l’assertion selon laquelle « l’enfer est pavé de bonnes intentions ». En voulant ménager tous les intérêts, la FNH s’enlise dans des déclarations sans lendemain. En refusant de reconnaître que les décisions à prendre sont difficiles et douloureuses, « l’occultation du mal s’ensuit inévitablement », comme l’a remarqué J.-P. Dupuy [33]. Nul doute que de nombreuses organisations écologistes attendent avec impatience que « l’hélicologiste » [34]soit démasqué. La force de la FNH, toutefois, est de prendre le grand public là où il est. La majorité de nos concitoyens n’a pas encore réalisé toute l’ampleur des conséquences de l’enjeu écologique sur leurs modes de vie – qu’il s’agisse des solutions ou des risques eux-mêmes. Ils sont rebutés par les revendications des associations écologistes historiques, qu’ils jugent souvent excessives. Si elles veulent grandir, elles devront apprendre la patience et la pédagogie. Elles devront apprendre à partir du quotidien des gens. Elles pourront compter sur une diffusion grandissante des questions écologiques.

L’important pour les ONG est de tenir l’enjeu, de secouer les partis politiques, sans prendre leur place. L’opposition de gauche a été totalement absente lors du Grenelle. Les lieux de pouvoir tenus par la gauche, comme les régions et l’ARF, ont joué un jeu politicien, stérile, s’opposant de manière peu constructive au gouvernement. Secouer les citoyens et les partis politiques implique des ONG qu’elles différencient clairement la question des enjeux, qui doit être appropriée par toutes et tous, de la question des solutions possibles, domaine dans lequel elles n’ont guère qu’un pouvoir de conseil, d’indication, et non un pouvoir de négociation – faute de mandat clair de la part du peuple. Les ONG, y compris FNE, devraient sans cesse recentrer les débats sur les enjeux, sans cesse rabâcher les données fondamentales du problème – dans la dénonciation et dans la suggestion d’alternatives ambitieuses, techniquement faisables, ainsi par exemple les scénarios de sortie du nucléaire publiés par le Réseau éponyme. Le pédagogue connait les vertus de la redondance.

Ce que le Grenelle nous apprend sur l’écologie politique en France

Le premier acquis est qu’il y a désormais consensus sur les risques écologiques qui nous guettent et sur le fait qu’ils ne peuvent qu’augmenter sauf à procéder à des changements politiques importants et douloureux. Mais, comme l’a dit un représentant du MEDEF, au-delà des objectifs consensuels pour réduire ces risques, les manières d’y parvenir et les priorités divergent.

Le Grenelle a précisé différents partis politiques en matière d’écologie. Du côté des partis, on l’a vu, les lignes ont peu évolué. L’UMP et le PS restent largement en dehors de ces questions, seuls les partis historiques ont suivi le mouvement. En termes de mouvements sociaux, le Contre-Grenelle a pu donner l’impression d’une ligne de partage claire : les syndicats et ONG d’un côté, les autres de l’autre côté. On peut en douter, pour plusieurs raisons. Tout d’abord le positionnement des ONG reste ambigu sur le social et l’égalité. Seuls les Amis de la Terre ont réellement travaillé avec la méthode syndicale, c’est-à-dire en se mouillant au-delà des mots et des communiqués de presse. FNE a parfois soutenu, mais toujours dans une ligne légaliste. La manifestation contre la fermeture du fret par la SNCF constitue à cet égard un précédent intéressant. Les autres associations se sont coordonnées avec les syndicats mais les désaccords sont apparus dès que les choix écologiques ou sociaux devenaient ambitieux, à la hauteur des enjeux.

La question de la fiscalité sera décisive, à double titre. « Internaliser les externalités » va menacer le pouvoir d’achat, puisqu’il s’agira de payer pour ce qui est utilisé gratuitement : c’est une question qui n’a pas été abordée de front pendant le Grenelle. Créer une rareté artificielle, instituée, afin de respecter les écosystèmes, fera monter les prix. Les citoyens ne peuvent l’accepter sans contre-partie symbolique. Le « besoin d’écologie » devra fortement croître - et être rendu visible à l’échelle locale, car sans cela, « défendre la planète » reste trop abstrait. Il n’y a pas de moyen simple pour faire la balance entre services économiques et services écologiques. On pourrait croire retrouver ici la ligne de force marxiste classique. Ce n’est pas le cas. Si l’on considère la propriété des moyens de production dans leur ensemble, « services écologiques » inclus, alors de nombreux « pauvres » et exclus français font partie de la classe consumériste mondiale. Ces personnes n’ont peut-être pas la propriété des machines mais elles peuvent acheter, jour après jour, les nourritures minérales qui les font fonctionner. Elles en sont donc de fait propriétaires. C’est d’ailleurs ce qui justifie la protestation des associations telles que « 40 millions d’automobilistes », qui entend réaffirmer la « nécessité » de la voiture, en l’élevant quasiment au rang de droit – reportant le problème sur « la technologie », sommée de trouver une solution. Cela revient à se décharger de toute responsabilité. Nanties et exploiteuses à l’échelle planétaire, les classes consuméristes peuvent compter des membres parmi les exclus dans les Etats riches, car le minimum vital qu’elles utilisent est déjà très consommateur sur le plan écologique. Inversement, réduire le pouvoir de consommation pourrait faire croître l’exclusion. Comment surmonter cette tension ?

Relire Illich ici peut nous indiquer une piste intéressante [35]. En substance, il dirait ceci : l’Occident a inventé des moyens toujours plus dispendieux pour satisfaire ses besoins, qui n’ont semble-t-il guère varié, dans le fond (communiquer, s’amuser, jouir d’un certain confort etc.). Mais vient un moment où les moyens eux-mêmes génèrent des obstacles. L’exemple connu de la mobilité [36]peut tout aussi bien s’appliquer à l’information (la disponibilité de notre attention est limitée) ou à l’éducation (les diplômes sont en quantité limitée). Les exclus sont ceux qui ne peuvent ni avoir recours aux infrastructures dominantes ni avoir recours à des infrastructures alternatives, celles-ci ayant été rendues impraticables par le monopole : la voiture a chassé le vélo, les inondations handicapent la marche à pied dans les pays touchés par les « événements climatiques extrêmes ». Ainsi se dessine un lien social qui n’est plus économique mais écologique, au sens large. Nous ne sommes plus dans le référentiel économique, qui unissait marxistes et partisans du marché. G. Stedman-Jones le montre bien : l’utopie marxiste s’ancre dans un désir de république commerciale juste, une administration des choses dont l’exploitation aurait été extirpée [37]. L’échange autorégulateur serait ainsi vierge de toute « pollution » et deviendrait autogestionnaire. Avec l’écologie, les sources de productivité sont radicalement déplacées. Dès lors l’utopie qui se fait jour s’ancre dans des droits sur la productivité de ce « corps inorganique de l’homme » [38]qu’est la nature, et non dans l’échange « économique », c’est-à-dire à rendements croissants. Défendre la nature, c’est défendre ses droits sur une productivité intacte, qui sera d’autant plus nécessaire que les ressources fossiles qui permettent de compenser les dégradations des écosystèmes deviendront rares.

Mais qui a quels droits sur quelles ressources de quels écosystèmes ? Il s’agit là de l’inégalité devant les pollutions (toxiques, ondes électromagnétiques etc.) mais aussi de la fracture existant entre la « classe consumériste mondiale » [39], qui habite dans l’OCDE mais aussi en Chine, Inde etc. et l’ensemble des personnes dont l’impact écologique reste faible. Pour assurer son train de vie, cette classe épuise le substrat – naturel et humain - dont elle tire sa force. Les « externalités » ont toujours un lieu, et l’on a souvent noté l’ambivalence du « syndrôme NIMBY » - caprice des riches ou appel au secours des pauvres. A ce titre, la question de la « justice environnementale » a été implicitement présente lors du Grenelle, que ce soit dans le souci d’éliminer les toxiques (« ni ici, ni ailleurs »).

Le débat glisse vers des questions territoriales. Tous les acteurs demandent davantage d’intervention publique – qui doit donc bien désigner qui est le « public » concerné et décidant. L’écologie signe la fin de l’utopie marchande, la sortie du capitalisme, pourrait-on dire, sans pour autant déboucher sur l’utopie socialiste : voilà la nouvelle situation qui s’offre à nous. L’intervention publique ne génère pas forcément plus de justice, si elle n’est aux mains de la démocratie. Défendre la démocratie demandera de s’appuyer sur la société civile. Les syndicats semblent prêts à prendre en compte cette évolution, même s’ils font encore de la croissance du PIB un impératif. Ils ont renoncé à leurs prétentions « historiques », telles que théorisées par le marxisme. Les écologistes font désormais partie du paysage idéologique, ils ne font plus figure de mouvement exotique, hystérique, marginal [40]. Ils proposent des perspectives qui intéressent de plus en plus d’acteurs. Plusieurs organisations patronales, notamment la Confédération Paysanne et le CJD, ont fait des propositions dans ce domaine. Gagner sur ce terrain nécessitera de mettre la société de leur côté, proposer des alternatives, construire des convergences. Cela suppose d’une part travailler sur les enjeux communs, comme la santé au travail, la production de toxiques (REACH), l’opposition aux OGM, la construction de nouvelles filières économiques etc. et d’autre part préparer des mesures de transition, qui permette de restructurer l’économie sur la base de l’égalité, à l’échelle planétaire comme à l’échelle nationale.

En conclusion, si le Grenelle reste incertain quant à ses résultats sur l’environnement, nul ne peut nier qu’il ait constitué un formidable accélérateur de l’histoire dans ce domaine. Mais l’histoire reste (trop ?) ouverte…

// Article publié le 10 janvier 2008 Pour citer cet article : Fabrice Flipo , « Le Grenelle de l’environnement, 2 mois après : conclusions et perspectives », Revue du MAUSS permanente, 10 janvier 2008 [en ligne].
https://journaldumauss.net/./?Le-Grenelle-de-l-environnement-2
Notes

[1Par exemple A. Le Floc’h, « L’irruption d’un ’Grenelle de l’environnement’ ? Chronologie de l’événement », La Revue du Mauss Permanente, 2008.

[2Rappelons que le Grenelle n’avait pas l’ambition de proposer de mesures dépassant l’échéance du mandat présidentiel en cours. Nicolas Sarkozy avait en revanche souhaité « une rupture », dans ce domaine comme dans bien d’autres.

[4Pour mémoire : les associations (ou ONG), les syndicats, les organisations patronales, les collectivités territoriales et l’Etat.

[5Division par quatre des émissions de gaz à effet de serre

[6C’est-à-dire : -20% de gaz à effet de serre, -20% sur la consommation d’énergie et 20% d’énergie renouvelable dans l’énergie consommée en Europe d’ici 2020.

[7C. Gerondeau, président de la fédération des Automobile-clubs, publie Ecologie, la grande arnaque chez Albin Michel le 26 septembre… il y dénonce la haine de l’automobile etc.

[8Pour un panorama complet, voir F. Flipo, Le développement durable, Paris, Bréal, 2007.

[10Voir les analyses de l’association « 40 millions d’automobilistes », opposée à toute mesure sur les comportements ou mettant en cause le symbole de liberté que constitue la voiture individuelle. http://www.40millionsdautomobilistes.com/Data/Dossiers/moment/237.asp

[11C’est un engagement déjà pris par Jacques Chirac

[12C’est l’écotaxe classique – voir www.noe21.org par exemple

[13« Chasse, pêche, nature et traditions ».

[14L’Académie a publié le 13 septembre un rapport affirmant que l’environnement n’a aucune influence sur l’occurrence des cancers, contrairement aux positions des associations qui accusent pesticides, toxiques chimiques etc. de la hausse vertigineuse des cas de cancers constatée au cours de ces dernières décennies - http://www.academie-medecine.fr/detailPublication.cfm?idRub=26&idLigne=1121

[15L’industrie des pesticides, en conséquence de ses liens de plus en plus forts avec la pharmacie, les semences et les technologies de l’information, mais aussi dans un souci de respectabilité, a choisi de rebaptiser ainsi son activité.

[16Nous employons ici ce terme au sens qui lui est attribué par L. Boltanski & Eve Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999.

[17Surface Agricole Utile

[19Suivant la terminologie d’Alain Gras, Les macro-systèmes techniques, Paris, PUF, 1997.

[20Conseil National du Développement Durable

[21EEA, Late lessons from early warnings : the precautionary principle 1896-2000, 2002.

[22Loi no 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE)

[23Bureau de Vérification de la Publicité

[2460 millions de consommateurs, Le Monde Diplomatique, Le Parisien etc.

[25Voir par exemple l’analyse d’Alain Lipietz qui se demandait ce que les syndicats avaient à faire au Grenelle – « Le Grenelle de l’environnement, pour quoi faire ? » http://lipietz.net/spip.php?article2083

[26U. Beck, La société du risque, Paris, Flammarion, 2003.

[27Note de cadrage du Grenelle de l’environnement, Cabinet du MEDAD, 16 juillet 2007.

[28Voir la référence citée plus haut. Pierre Radanne, ancien président de l’Ademe, et Michel Mousel, ancien chef de la délégation diplomatique française au sommet de Johannesburg sur le développement durable, sont tous deux de fins observateurs des évolutions de ces dernières décennies.

[29Voir les travaux sur les ONG tels que P. Le Prestre, Protection de l’environnement et relations internationales, Paris, Dalloz-Sirey, 2005.

[30F. Flipo, « Légitimité et rôle des ONG dans le débat mondial », Territoires, n°442, novembre 2003.

[31Voir le sondage Ethicity 2006, réalisé pour l’Alliance.

[32Voir le baromètre IRSN, La perception des risques et de la sécurité par les Français, 2007.

[34Qualificatif décerné par le journal satirique « La Décroissance »

[35I. Illich, Œuvres complètes, Paris, Fayard, 2006.

[36Energie & équité – la voiture permet d’emporter 4 à 5 personnes mais suppose voies de circulation, ravitaillement etc.

[37G. Stedman-Jones, La fin de la pauvreté, Paris, Editions Ere, 2007.

[38K. Marx, Manuscrits de 1844, Paris, Editions Sociales, 1972.

[39Selon le World Watch Institute, cette classe est constituée d’un bon milliard de personnes, dont les revenus annuels sont supérieurs à 7000 dollars.

[40Cf. par exemple les analyses d’Isabelle Sommier ou de C. Aguiton & D. Bensaïd, Le retour de la question sociale, Paris, Page Deux, 1997, qui ne font aucune mention des mouvements écologistes.

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